Musée: vers 1550, pendentif orthodoxe miniature en buis Mont Athos Grèce

Haute époque

Exceptionnel pendentif d’évêque dit « ENCOLPION »
- soit littéralement le médaillon porté sur le sein ou sur le torse

Travail de moine, gréco-byzantin vers 1550, caractéristique des œuvres du Mont Athos en Grèce, en buis sculpté et ajouré, caractérisé par une sculpture rustique mais néanmoins d’une incroyable finesse.

Cette plaque ronde miniature (diamètre total 7cm) était originellement sertie par un entourage ou fourreau, probablement en argent, vermeil, ou en or, et comporte plusieurs sujets iconographiques tirés du Nouveau Testament.
Son riche décor ajouré encadrant les sujets et remplit l'espace entre eux, montre un travail de patience étonnamment attentif qui permet de discerner les divers sujets bibliques de petite taille, y compris les détails de la représentation des vêtements et des attributs des personnages.
La plaque se compose de plusieurs images circulaires qui forment un seul ensemble sous la forme d'une rosette gothique. 

Elles comprennent
*six scènes de la Passion du Christ,
*4 portraits plus petits des évangélistes au centre,
*et 3 de grands prophètes dans la partie inférieure.
Il est à noter que la sculpture du médaillon respecte un ordre libre.  La scène de la résurrection de Lazare devrait dans une lecture logique être la 1^ère, puisque préfigurant celle du Christ, puis la Crucifixion, la descente de croix, la Résurrection, l’incrédulité de St Thomas et le Sépulcre vide.

Références :
Cette sculpture minutieuse sur bois rappelle la manière dont la croix-reliquaire exposée au -Louvre est fabriquée. C'est une croix-reliquaire en bois sculptée de dix-huit scènes de la vie du Christ et trois reliquaires aux extrémités, et elle date XV-XVI siècle (Collection du Louvre, Numéro principal : LP 1043, Salle 501, Aile Richelieu).
A consulter également les œuvres du Musée BENACKI à Athènes ou encore de la Sacristie/ du Trésor des Météors (Monastère au Nord de la Grèce, situé en haut d’un énorme python rocheux).

Provenance :
Ancienne collection Henri Verne (1918-2021) à Bruxelles (créateur du personnage de Bob Morane)

*1. La Crucifixion (en haut à droite)
On y trouve les saintes femmes, soient Marie, la Mère de Dieu et Marie-Madeleine, l'apôtre saint Jean (l’Evangéliste) se lamentant et Longin (portant une jupe courte de soldat, et non une toge comme les autres personnages saints représentés).
A droite du Christ, le soldat lui perçant le corps de sa lance et à sa gauche un autre soldat tendant une éponge afin de récupérer un mélange de sang et d’eau sortant de son corps, qui seront ensuite mis dans un vase -qui deviendra le Saint Graal.

*2. La descente de croix (au centre à droite)
Le Christ est allongé sur une plaque de marbre. Il est à noter que le tombeau du Christ est représenté comme un sarcophage romain et pas comme dans la tradition juive comme une cavité rocheuse fermée par une roue ronde en pierre que l’on faisait rouler pour fermer le caveau.
Les arcades à l’arrière-plan représentent la ville de Jérusalem
La Mère de Dieu tient la tête du Christ, aux côtés de Marie Madeleine et de St Jean l’Evangéliste …

*3. La Résurrection du Christ, en bas à droite
Il ne s’agit ici pas seulement de la seule résurrection du Christ mais aussi de tout ce qu’il incarne, de la résurrection de tout le genre humain. 
Le Christ a les pieds sur 2 planches, qui représentent les portes ébranlées de l’Enfer, le lieu des Morts. Le Christ tient par ses mains Adam, l’Homme barbu et Eve, la femme voilée.
Le côté gauche du Christ représente le genre masculin avec derrière Adam 2 personnages couronnés, David et Salomon, incarnant respectivement la Sagesse et la Fidélité à Dieu.
Derrière le Christ, est figurée la mandorle (avec des stries représentant le rayonnement), représentant la Lumière émanant du Christ réscucité.

4. La résurrection de St Lazare (au milieu à gauche)  
Lazare est représenté debout dans son tombeau, avec à ses pieds 3 femmes, dont Marthe et Marie, ses sœurs de Béthanie. Elles implorent le Christ, qui tend sa main dans un geste de bénédiction. Derrière le Christ se tiennent 4 des apôtres, dont St Pierre et St Jean.
La résurrection de Lazare est un miracle de Jésus rapporté uniquement par l’Évangile de Jean (Jean 11:1–44), durant lequel Jésus ramène Lazare de Béthanie à la vie quatre jours après son enterrement. Marthe et de Marie de Béthanie, sœurs de Lazare demandent au Christ la résurrection de leur frère, déjà au tombeau depuis plusieurs jours. Ce thème symbole est souvent utilisé pour préfigurer la propre Résurrection du Christ.
À leur arrivée à Béthanie, Lazare est mort et enterré depuis quatre jours. Avant d'entrer dans la ville, Marthe, la sœur de Lazare, vient à la rencontre de Jésus et lui dit : « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. » Jésus assure à Marthe que son frère ressuscitera et déclare : « Je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, encore qu'il soit mort, il vivra. Et quiconque vit, et croit en moi, ne mourra jamais ; crois-tu cela ? » Marthe affirme qu'elle croit vraiment et déclare : « Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, qui devait venir au monde. » Ce n'est que la deuxième fois (après Nathanaël) que quelqu'un déclare Jésus comme Fils de Dieu et la première fois que quelqu'un l'assimile au « Messie » et au « Fils de Dieu » ensemble.
En entrant dans le village, Jésus rencontre Marie et les gens qui sont venus la consoler. Jésus est profondément ému à la vue de leur chagrin. Après avoir demandé où il a été enterré, Jésus demande que la pierre de la tombe soit enlevée, mais Marthe intervient et déclare qu'il y aura une odeur. À quoi Jésus répond : « Ne t'ai-je pas dit que si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ? »
Ils retirent alors la pierre, Jésus lève les yeux et dit : « Père, je te rends grâces de ce que tu m'as exaucé. Pour moi, je savais bien que tu m'exauces toujours ; mais j'ai parlé à cause de la foule qui m’entoure, afin qu'ils croient que c’est toi qui m'as envoyé. »
Il crie alors à haute voix : « Lazare, sors ! » Le mort en sort, les mains et les pieds enveloppés de bandes de lin et d'un chiffon autour du visage. Jésus leur dit : « Déliez-le, et laissez-le aller. »

Cette scène est ici placée de façon surprennate dans l'ordre logique que l'on attendrait dans la succession des différents tondos, puisqu'elle préfigure traditionnellement la résurection du Christ. On devrait donc plutôit la trouver en haut au centre, au début de la narration religieuse de cette oeuvre (soit en haut à droite, puis un décalage des 5 autres scènes dans le sens des aiguilles d'une montre). L'auteur a ainsi et volontairement souhaité mettre l'accent sur cette scène et sur le personnage de Lazare.
 
*5. Le Sépulcre vide (en haut à gauche)
 Les Myrophores (Les Saintes Femmes mentionnées dans le Nouveau Testament qui participèrent à l'ensevelissement de Jésus et qui découvrirent le sépulcre vide après sa Résurrection. Ce terme renvoie usuellement aux Saintes Femmes porteuses de myrrhe qui, se rendant au petit matin à la tombe de Jésus, trouvèrent celle-ci vide) Marie, Mère de Dieu et Marie-Madeleine, portant des bouteilles rondes contenant des aromates destinés à la conservation des corps, trouvent la nuit le sarcophage du Christ ouvert et son corps n’y est plus. Un ange avec les ailes déployées est agenouillé à l’endroit où se trouvait le corps du Christ, au-dessus de la plaque tombale ouverte du sarcophage (toujours la représentation de type romain du tombeau du Christ)   .

*6. L’Incrédulité de Saint Thomas (en bas à gauche)
Le Christ est entouré de St Pierre portant la barbe courte, St Jean l’Evangéliste imberbe, et de 2 autres apôtres (St Jacques fils de Zébédée est aussi fréquemment représenté comme un des apôtres préférés du Christ)
St Thomas ne croyait pas à la résurrection et touche avec son doigt la plaie du Christ.

Les enroulements séparant les réserves rondes abritant les diverses scènes et représentations symbolisent les sarments de vigne, et les croisillons les grappes de raisins. Elles séparent traditionnellement les diverses scènes iconographiques religieuses.

*On peut voir, au centre du médaillon, les 4 évangélistes Matthieu, Marc, Luc et Jean disposés dans 4 réserves rondes plus petites, formant entre elles un carré.
*Dans la partie inférieure, il s’agirait, de chaque côté, de 2 prophètes juifs lisant les Ecritures sur des rouleaux (« Elitarion») :
-Ezechiel, le prophète de la Résurrection des Morts, -qui signifie en hébreu « Dieu renforcera ». Il est un prophète de l'Ancien Testament qui a probablement vécu au vi^e siècle av. J.-C. Son nom veut dire « Que le Seigneur le fortifie ». On lui attribue le Livre d'Ézéchiel, troisième dans l'ordre canonique des grands prophètes (Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, Daniel). Pour le judaïsme et le christianisme, Ézéchiel est prêtre du Temple de Jérusalem.

-Isaïe, dont le nom signifie « Yahvé est salut », a vécu à Jérusalem au VIIIe s avt JC, au temps du roi Ezéchias, au moment où la grande puissance voisine, l’Assyrie, devenait menaçante. Le prophète dénonce le relâchement des mœurs qui annonce la défaite prochaine, mais salue le rôle salvateur de la Mort du Christ, sacrifié injustement sur la Croix.

*Enfin au centre en bas, le prophète Jonas, envoyé par Dieu à Ninive, symbole d'oppression et de violence, pour condamner la ville et l'inviter à se repentir, mais il s’enfuit dans la direction opposée, embarquant sur un navire en partance pour Tarsis afin d'échapper à la parole de Dieu, et fuir sa mission dangereuse de prophète en pays païen.

Jonas monte dans un bateau, puis descend dans la cale et s'endort. Le navire est pris dans une grande tempête. Les marins prient vainement chacun à l'adresse de sa propre divinité puis jettent les sorts afin de découvrir la cause de ce malheur, et les sorts désignent Jonas plongé alors dans un profond sommeil au fond d'une cale. L’équipage interroge leur passager qui affirme son identité comme « Hébreu » (‘ivri) et « leur propose de lui-même qu’on le précipite dans l’eau afin de calmer les flots impétueux ». Il est lancé à la mer, qui se calme aussitôt.
Avalé par un grand poisson (souvent improprement appelé « baleine ») durant trois jours et trois nuits, Jonas se met à prier en regrettant sa fuite et se voit vomi sur une plage par le monstre marin.
Une nouvelle fois, Dieu donne l’ordre à Jonas d'aller à Ninive pour réprimander sa population pour sa conduite. Jonas, cette fois, ne se dérobe pas et reprend le chemin pour Ninive. Il y annonce le futur jugement aux habitants de la cité : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! ». Les habitants se repentent ; le roi de Ninive ordonne même un jeûne collectif afin d’inciter ses sujets à se détourner de leurs mauvaises actions. Le texte précise : « Et Dieu Se ravisa concernant le mal qu’Il avait dit qu’Il leur ferait, et Il ne le fit pas » : Dieu leur pardonne et ne détruit pas la ville.
Le Nouveau Testament fait mention de Jonas. Jésus enseigna que Jonas avalé par le poisson annonçait ses propres mort et résurrection. L'Évangile selon Matthieu fait mention au chapitre 12 d'un signe de Jonas qui semble être l'annonce de la mort de Jésus Christ pendant trois jours complets, suivis de sa résurrection. Dans l'Évangile selon Luc au chapitre 11: « (...) parce qu’ils se sont repentis à la prédication de Jonas(...) », le signe est celui de la conversion des païens, alors que les Juifs gardent leur distance vis-à-vis de Jésus.

Diamètre 7cm et 1 à 5 mm épaisseur seulement !!!
Parfait état de conservation. Ces médaillons étaient souvent enchassés dans des montures d'orfèverie parfois très chargées, baroques. (Voir dernière photo)

Cette véritable pièce de musée est, me semble-t'il, de qualité supérieure à celle conservée au MOMA de New York, figurant St Jean terrassant le dragon (voir 1ère pièce de la dernière photo), alors que les Musées du Louvre ou encore le british Museum n'en possèdent pas; Les autres pièces de référence font toutes partie des collections des monastères du Mont Athos soit d'un accès relativement restreint ! (voir dernière photo)

Tous mes chaleureux remerciements au Père orthodoxe Théotokis du Monastère de Solan (Gard) qui a démontré encore une fois avec brio et talent sa connaissance profonde de l'iconographie religieuse et de ces trésors provenant de la région où il a suivi lui-même sa propre formation spirituelle, le Mont Athos en grèce.