Pierre Letuaire (1798-1884), Paysage de Provence au promontoire, fusain, signé

Pierre Letuaire (1798 – 1884)
Paysage de Provence au promontoire
Fusain
19,5 x 14,5 cm
Signé au centre de la composition « letuaire »

Encadré, sous verre
Dimensions avec le cadre : 29,5 x 24 cm

Bon état, légères rousseurs dans le ciel

Dessin fait sur le motif, souvenir d'une promenade au cœur de la campagne provençale, ce dessin au fusain de Pierre Letuaire est une élégante et poétique représentation de ces étapes d'un chemin que l'on oublierait de regarder si un artiste ne savait si bien saisir le passage du temps sur les pierres et la permanence du mouvement de la nature autour de ce que l'homme a bâti.

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La vie et la carrière de Pierre Letuaire sont entièrement liées à la ville de Toulon, dont l’histoire, le littoral et la lumière ont été les sources d’inspiration premières de ses œuvres tout au long du siècle. Le dessin également, d’une certaine manière, n’a cessé de l’inspirer, dans toute la variété de ses technique et possibilités.

Pierre Letuaire enseigna toute sa vie le dessin, dans les écoles et collèges, ainsi que dans son atelier privé à Toulon, cette ville portuaire à la fois entourée de paysages rocheux et ouverte sur l’Orient, où la puissance des tableaux des peintres d’histoire Pierre-Jacques Volaire (1729 – 1799) ainsi que Laurent Julien (1740 – 1820) – seul maître attesté de l'artiste – devaient encore impressionner de nombreux amateurs. Letuaire fut lui-même le premier professeur de peintres qui, contrairement à lui, ont eu l’ambition de la peinture à l’huile, le désir d’exposer aux Salons, de voyager et d’explorer par eux-mêmes l’Afrique du Nord et les horizons plus vastes – toutes choses qu’il a certainement décidé, à un moment de sa carrière, de ne pas faire. Parmi ses élèves, citons particulièrement Vincent Courdouan (1810 – 1893), le peintre et navigateur Barthélémy Lauvergne (1805 – 1871) ainsi que l’Orientaliste délicat Emmanuel Lauret (1809 – 1882).

La Fondation Custodia à Paris, par exemple, conserve un bel ensemble d'études à la fois libres et minutieuses, rapides et poétiques, qui démontrent à la fois une économie de moyens et une profusion d’idées de compositions, d’effets picturaux et de recherches graphiques, qui rappellent, au fil du siècle, les études de ciel de Paul Huet ou encore les dessins et aquarelles de petit format d’Eugène Ciceri ou encore Henri Harpignies. Une partie de cet ensemble a été exposé à l'automne 2022 à Paris, preuve que Letuaire est un dessinateur remarquable dans son siècle qui mérite toujours notre attention.

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Lorsque l'on étudie la peinture provençale, c'est toujours un plaisir de pouvoir citer le passionnant historien de l'art, Jean-Roger Soubiran, ici au fil d'extraits du catalogue de l'exposition consacrée à Pierre Letuaire, au musée de Toulon entre novembre 1985 et février 1986 :

La Provence de Letuaire n'est pas une terre de lumière ou de couleurs, mais un pays de découpe et de structures. Ses paysages sont des vedute, des vues topographiques qui font souvent penser à des dessins de graveurs, projets de burins ou d'eaux-fortes, comme au 17ème siècle. Le sujet est subordonné à la description de la nature, où règne l'exactitude de l'observation, la justesse de la narration.

Cependant, la froideur et le calme de l'analyse ne sont qu'apparents et voilent une pudeur et une sensibilité bien réelles. Elle perce dans l'écriture rapide en zig-zag, dans les zébrures nerveuses qui suggèrent les ombres à l'intérieur des frondaisons. Ailleurs, les feuilles, loin d'être dessinées une à une, comme le veut l'esthétique néoclassique, sont rendues globalement par des griffonnis, tire-bouchons spontanés d'une totale liberté pouvant aller jusqu'aux enchevêtrements d'une écriture automatique où l'on retrouvera l'extravagante modernité d'un Ziem.
Les dessins de Letuaire concernent essentiellement Toulon, sa campagne immédiate et son littoral, de Sainte-Marguerite à Saint-Mandrier. Les dessins varois ont été exécutés à l'occasion des séjours salutaires accompagnant sa fuite devant le choléra de 1835 (il se réfugie à Lorgues et pousse jusqu'à Gap) et de 1849 (Le Luc) mais aussi au moment de ses déplacements comme correspondant général de la revue « L'Illustration ».