Portraiturée de trois quart face, notre jeune princesse scrute le spectateur, adoptant une pose dictée par les canons esthétiques de son temps. Probablement issue de l’aristocratie lombarde ou émilienne, elle est vêtue d’un somptueux costume aux précieuses étoffes. La simarre (robe de dessus) de velours vert émeraude et la chemise de soie blanche sont cousues de fils d’or. La fraise haute présente la tête comme posée sur un plateau. Les cheveux s'élèvent en raquette et la tête est couronnée par un bonnet orné en son centre d'une aigrette. Enfin, les nombreux bijoux - sautoir d’or à plusieurs rangs, collier serti de rubis et de perles, riche médaillon représentant la Vierge – sont autant de témoignages de l’importance du rang de notre princesse.
De nombreux indices, picturaux et techniques, nous conduisent dans l’univers de la femme peintre dont Vasari et Michel-Ange ont apprécié le talent. La grande attention portée aux détails avec un fort impasto pour créer l’impression de profondeur, la coloration du visage, et le tracé de la main gauche en « U carré » nous renvoient à Sofonisba Anguissola. Mais la densité des carnations et le dessin d’une main charnue nous en écartent quelque peu. Lorsqu’en 1566 Giorgio Vasari rend visite à la famille Anguissola, Sofonisba est absente puisqu’au service de la cour d’Espagne depuis 1559, ce qui n’empêche pas l’auteur des célèbres « Vite » de relater que les « six sœurs accomplissent des merveilles » (en matière de dessin et de peinture évidemment). Nous sommes vraisemblablement en présence de l’œuvre de sa sœur la plus talentueuse, Lucia qui imitait son ainée tout en ayant son propre caractère, peignant notamment des mains plus charnues. Lucia a produit d’excellents portraits : Le Docteur Pietro Maria musée du Prado Madrid, Autoportrait Galleria Borghese Rome.
Notre portrait est présenté dans un puissant cadre florentin d'époque dit « Médicis » en bois sculpté, doré et rechampi brun.
Dimensions : 64,5 x 50,5 cm – 98 x 84 cm avec le cadre
Vendu avec facture et certificat d'expertise.
Biographie :
Sofonisba Anguissola (Crémone c. 1535 - Palerme 1625) est née dans une famille noble de la petite ville lombarde sous tutelle de la couronne d’Espagne. Elle doit son prénom à la tradition instaurée par son arrière-grand-père qui place la famille sous le signe de l’histoire ancienne de Carthage. Ainsi son grand-père porta-t-il le prénom d’Annibale et nomma le père de Sofonisba Amilcare. Ce dernier, très en avance sur son temps, donne à ses six filles la même éducation que celle habituellement réservées aux fils de l’aristocratie et les encourage à développer leurs talents artistiques. Placée avec sa sœur cadette Elena dans l’atelier de Bernardino Campi dès 1549, Sofonisba développe un sens accru de l’art du portrait. En 1554, elle part pour Rome avec une petite suite (peut-être accompagnée d’une de ses sœurs) et Michel-Ange, qu’elle a probablement rencontré, loue les qualités de ses dessins. Sous l’influence d’Il Divino, sa compréhension de l’anatomie et sa sensibilité s’affinent. En 1557, elle se rend à Plaisance, Mantoue ou Milan pour honorer des commandes de portraits. A Parme, elle rencontre Giulio Clovio qui l’initie à l’art de la miniature.
En 1559, sur les recommandations du Duc d’Albe, elle est nommée dame d’honneur de la nouvelle reine d’Espagne, Isabelle de Valois, à qui elle apprend le dessin. Débute alors un long séjour espagnol durant lequel elle peint une grande quantité de portraits des membres de la famille royale ainsi que de la noblesse. Cinq ans après la mort de sa protectrice, en 1573, elle épouse un noble italien qu’elle rejoint sur ses terres de Sicile, mais il meurt lors d’un périple en mer en 1578. L’année suivante, elle convole en secondes noces avec un négociant génois. Installée définitivement avec son époux à Palerme vers 1615, elle cesse de peindre, ses facultés visuelles l’abandonnant. Anton van Dyck, appelé à Palerme pour peindre le vice-roi Emmanuel Philibert de Savoie, vient lui rendre hommage. C’est dire la fascination que cette femme peintre suscitait de son vivant.
Bibliographie :