(Joinville-le-Pont, 1803 – Boulogne-sur-Seine, 1874)
Le jardin fleuri
Huile sur panneau
H. 34 cm ; L. 48 cm
Signée et datée en bas à gauche. « Ate. Lapito. 1860 »
Elève de Watelet et du peintre d’histoire François-Joseph Heim, Lapito connut le succès durant toute sa carrière, avec plusieurs médailles et des acquisitions de l’Etat (achats de Louis-Philippe pour les châteaux de Saint-Cloud et de Compiègne). Il était à la fois adepte de la peinture de plein-air et des compositions retravaillées en atelier dues à sa formation classique, dans les deux cas avec une touche précise et un sens de la couleur très affirmé. Parmi ses nombreuses fortunes critiques, on peut citer celle du Journal des Artistes en 1838: « … M. Lapito continue de mériter les suffrages… Son dessin est toujours exact; malgré une touche large et facile, ses sites toujours bien choisis, sa couleur généralement vraie quoiqu’un peu dorée. Les productions de Monsieur Lapito se font toujours remarquer par leur ordonnance pittoresque, et la manière spirituelle dont elles sont touchées… » .
Louis-Auguste Lapito appartient à la seconde génération des paysagistes néo-classiques, influencés et formés par des artistes comme Valenciennes, Jean-Victor Bertin ou Louis-Etienne Watelet, mais qui développeront une sensibilité plus naturaliste, parfois teintée de romantisme et de pittoresque.
Réalisée à une époque où le peintre se révèle définitivement hermétique à l’esthétique des artistes de l’école de Barbizon, qu’il a fréquentés autrefois, l’œuvre présentée vaut comme un précieux témoignage de l’art de vivre de la bourgeoisie à la campagne sous le Second Empire. Seule compte la précision obsessionnelle avec laquelle l’artiste décrit les plates-bandes, la taille des rosiers, le dessin de la marquise ou encore les tons verts utilisés pour peindre les persiennes. Lapito va même jusqu’à représenter scrupuleusement le chapeau aspirateur de la cheminée, appareil ayant un effet de girouette pour se placer dans l’axe du vent et favoriser le tirage des âtres essoufflés… Rare témoignage pictural de cet objet industriel, entré dans une pure image de poésie, qui n’est pas sans rappeler les tonalités des peintres danois tel Eckersberg. La touche, la pose des ombres, la lumière vive donnent une vie particulière à cette toile hors normes du paysagiste habituée des frondaisons bellifontaines. Au premier plan les feuilles d’un jeune Yucca nous renvoient à la célèbre composition d’Antoine Cazal, réalisée en 1844, représentant cette même variété en fleurs dans le parc de Neuilly, aux côtés d’un perroquet en cage.
Ajoutez à cette carte postale le léger vent poussant les nuages et caressant les pigeons de la bourgade, et vous obtenez un moment de vie idéal de la classe moyenne en plein cœur du XIXe siècle.