Six illustrations d’une centurie de Nostradamus
Plume et encre noire, lavis d’encre, lettres et filet d’or sur
vélin
22,7 x 17,3 cm
Etat parfait
1632
Inscriptions au bas des dessins :
Cent 9. qu. 18. 1632
Le lyx d’Aufois 1 portera dans Nancy
Jusques en Flandres 2 Electeur de l’Empire. 3.
Neuve 4 obturée au grand Montmorency,
Hors lieux prouvez, livré à Clairepeine 5.
Romains 6 ne viennent car Montagnes en paix,
Champ montre felle 7. de nul 8. fommes trompez.
Renvoyant aux chiffres, des notes sur le côté proposent une
interprétation de ces prédictions :
1. Gaston de France.
2. Brusselles.
3. Treves.
4. Castelnaudarry.
5. Nom du bourreau de Beziers.
6. Levées du Ba. de St. Romain en Sav. pour Mr. en Lang.oc
Mr. Arfoit ( ?), les Rom. Viendront, mais sur l’avis d’une
lettre l’on écrivit au D. de Sav. qui les retint, ce qui sauva
la Province.
7. Mariage de Mr.
8. Espions ni chiff.
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Henry Bellange était le fils du peintre de cour lorrain Jacques
Bellange. Entré dans l’atelier de Claude Deruet en 1626, il se
mit d’abord au service du duc de Lorraine Charles IV, puis
séjourna en Italie entre 1633 et 1642. A partir de cette date, il
se fixa à Paris. L’attribution de notre parchemin à cet artiste
se fonde sur l’emploi de lavis d’encre en grisaille sur un
support en vélin bordé d’un filet d’or, ainsi que sur la
calligraphie en lettres d’or – critères que l’on retrouve sur
une série de portraits aristocratiques attribués à Henry
Bellange et conservés au musée du Château de Pau, de même
que sur une feuille signée détenue par le Harward Art
Museum. Le niveau d’exécution est compatible avec les
dessins connus d’Henry, lequel n’était pas un dessinateur du
niveau de son père.
Mais l’intérêt de ce rare document repose essentiellement
sur son aspect ésotérique, témoignage des pratiques
astrologiques dans la haute aristocratie du temps de Louis
XIII. L’interprétation des distiques semble proposer comme
clé l’équipée lorraine de Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII.
En 1631, Gaston se maria secrètement à Nancy avec la
princesse Marguerite de Lorraine. Il s’enfuit alors à Bruxelles
et tenta de manigancer le soulèvement contre Richelieu des
gouverneurs de province, parmi lesquels le duc de
Montmorency. Mais comme souvent dans ce genre de gnose,
les commentaires s’avèrent aussi obscurs que la prédiction
elle-même… Notre document a pu être élaboré a posteriori
dans l’entourage de Marguerite au palais d’Orléans, où les
Lorrains étaient nombreux, et où le climat d’intrigue
autorisait de semblables spéculations.