Ce dernier, né en 1643, est l’un des sculpteurs vénitiens les plus célèbres du XVIIe siècle. Il a voulu par son travail, répondre aux injonctions du maniérisme idéalisé de la Renaissance tardive. C’est pour cela que ses sculptures sont d’un réalisme où l’expression de ses personnages est portée à son apogée.
La femme, élégante, est coiffée d’un bandeau qui retient ses cheveux en arrière, une fine mèche se détache cependant de sa coiffure pour venir tomber délicatement dans son cou, cela rajoute un effet de réalisme à l’ensemble. Comme cela, nous pouvons encore mieux admirer le travail concernant les plis du visage du modèle. Ses pommettes sont saillantes, l’oeil vif et son sourire volontairement quelque peu édenté forme un ensemble cohérent avec l’autre buste.
Elle évoque peut-être l’allégorie de la Prudence, caractérisée d’une part, par son grand âge et de l’autre, par son regard près à voir le moindre danger, qualité qu’elle a seulement pu acquérir grâce à son ancienneté. C’est donc un traitement de la vieillesse positive que nous donne ici l’artiste.
L’homme pourrait être un philosophe ou un savant, son large front nous permet d’avancer cela. En effet, à cette époque, les philosophes étaient toujours représentés ainsi, symbole de leur sagesse. Ses cheveux à l’arrière ne sont pas terminés, comme si l’artiste savait que son oeuvre serait disposée contre un mur pour orner un salon et que donc cette partie ne serait pas visible.
Malgré tout, le traitement des cheveux et de la barbe est assez remarquable. La technique employée pour arriver à ce résultat est l’utilisation du trépan, sorte de foret actionné à la main au moyen d’un archet. Cet outil est employé depuis l’Antiquité afin d’atteindre des renfoncements, dégager des parties difficiles d’accès et dégrossir des gorges de faible diamètre en formant des cavités cylindriques. Lent mais précis, le trépan est destiné aux endroits très fragiles et à des matériaux durs comme le bois, la pierre et le marbre. La technique du trépan permet d’apporter mouvement et profondeur à l’ensemble.
L’homme, rieur, peut se rapprocher de Démocrite, en effet ce philosophe grec avait pour caractéristique d’être toujours en train de s’amuser de la bêtise humaine, ce qu’il arrivait à faire en prenant du recul grâce à son grand âge.
Nous pouvons aussi nous demander, si l’artiste a voulu à travers ces oeuvres, montrer une forme d’allégorie du temps qui passe grâce à la vieillesse de ces deux personnages. En effet, représenter la vieillesse en sculpture n’est pas un topos classique, mais cela permet de casser avec les codes de l’époque pour donner à voir du réalisme au profit du Beau. L’artiste a volontairement accentué les traits des visages pour faire des personnages presque repoussants. Malgré la première impression d’incompréhension face à cela, le spectateur est rapidement pris de tendresse pour ce couple souriant. Nous pouvons sentir dans l’expression de leurs visages une certaine dramatisation, typique de la sculpture baroque.
Franz Kafta, un écrivain Austro-Hongrois disait très justement cela « Le bonheur supprime la vieillesse ».