Directement inspirée d’une composition de Luca Giordano aujourd’hui conservée à la Fundacion Casa Ducal de Medinaceli à Séville, notre peinture offre au regard une scène dans laquelle la lumière occupe un rôle central. Comme installée sur une scène de théâtre de laquelle jaillit un puissant éclairage, notre sainte Famille accueille les royaux voyageurs accompagnés de leurs suites venant rendre hommage à l’Enfant. Au-delà d’une mise en scène savamment orchestrée, l’aisance picturale dont fait preuve notre peintre ravit : les couleurs sont vibrantes, la touche est virevoltante, le pinceau est agile et les forts empâtements amplifient les effets lumineux.
Charles-Nicolas Cochin, conseiller artistique du roi Louis XV, affirme que le baroque italien « vaut bien la beauté classique de l’Antiquité ou de Raphaël ». Ainsi, Jean-Honoré Fragonard, Jean-Baptiste Hutin, Louis Lagrenée, Hubert Robert ou Gabriel-François Doyen profitent d’un séjour à Naples pour découvrir l’art de Luca Giordano. Et dans les années 1760/61, l’abbé de Saint-Non, protecteur et principal commanditaire de Fragonard, lui fait systématiquement copier les œuvres de Giordano. Notre peinture pourrait-elle appartenir à ce corpus?
C’est Guillaume Faroult, historien de l’art et conservateur en chef au département des peintures du Musée du Louvre, qui propose la notion de « néobaroque » pour qualifier la production de ces artistes. Les œuvres de ces peintres français ont en effet en commun un « style fortement coloré et empâté, aux puissants contrastes lumineux », évoquant l’art de Luca Giordano. Le Grand Prêtre Corésus se sacrifie pour sauver Callirhoé peint en 1765 par Fragonard et conservé au musée du Louvre, en est une parfaite illustration.
Notre Adoration des mages est soulignée par un cadre du XVIIIe siècle aux lignes épurées en bois doré et rechampi jaune de type Salvator Rosa.
Dimensions : 35 x 46 cm – 53 x 62 cm avec le cadre
Vendu avec facture et certificat d'expertise.
Biographie
Jean-Honoré Fragonard (Grasse 1732 – Paris 1806) s’installe à Paris avec sa famille en 1738 où il fait preuve de dispositions artistiques précoces. Ainsi il est placé en apprentissage chez François Boucher à l’âge de quatorze ans après un bref passage dans l’atelier de Jean Siméon Chardin. En 1752, il remporte le Grand prix de l’Académie royale de peinture (prix de Rome) avec son Jéroboam sacrifiant aux idoles. Pensionnaire du Palais Mancini (Académie de France à Rome) de 1756 à 1761, il n’adhère pas à l’anticomanie prônée par le néo-classicisme et développe un goût personnel qui le conduit vers les peintres baroques italiens du siècle précédent. Avec une touche fluide, il développe alors un art rapide (fa’ presto) qui dégage un grand naturel. Durant son séjour à l’Académie, il rencontre Jean-Baptiste Greuze et noue une amitié avec Hubert Robert. Bien que destiné à briller dans la peinture d’histoire, il est touché par le sentiment de la nature et entame une carrière de charme où le libertinage tient une place centrale. Les frères Goncourt, dans la Gazette des beaux-arts de 1865, diront de lui « qu’il a été plus loin que personne dans cette peinture enlevée qui saisit l'impression des choses et en jette sur la toile comme une image instantanée » (Gazette des beaux-arts, 1865).
Bibliographie