Dans cette précieuse peinture de cabinet, nous sommes plongés au centre de la nef d’une église gothique qui s’anime : tandis qu’au premier plan une dame parait se confesser à un processionnaire coiffé d’un capirote, des personnages s’isolent pour se recueillir et d’autres se dirigent vers le chœur où un prêtre vêtu d’un chasuble blanc s’apprête à donner la messe. Mais de toute évidence, l’architecture est le sujet principal de la composition et les figures, prêtres et fidèles, sont reléguées au rang de simples figurants, prétextes à donner vie à la scène. Sans être vraiment identifiable, notre Intérieur d’église offre des traits qui s’apparentent à plusieurs églises des Pays-Bas. Aux côtés d’une architecture que l’on peut lire sur un mode réaliste, des éléments purement imaginaires et symboliques se combinent dans un jeu subtil de détails observés et d’éléments imaginés, prolongement de la conception symbolique de l’image.
Les premières représentations de ces intérieurs d’églises apparaissent avec le développement du protestantisme et le refus de l’idolâtrie. Après les assauts iconoclastes, les églises sont alors dénuées de tout objet décoratif. Cependant, le besoin d’une image pour fixer l’esprit dans la prière subsiste et la vue intérieure d’église prend toute sa place dès la fin du XVIe siècle, devenant une voie d’accès au sacré. Après la longue période de lutte qui oppose les réformés aux troupes espagnoles, et la naissance des Provinces-Unies, les catholiques s’approprient à leur tour l’iconographie des intérieurs d’églises. Sous leur patronage, les lieux de culte sont regarnies de retables, de crucifix, de tableaux représentant la vie du Christ et de statues, comme dans notre peinture.
Nous plaçons notre composition dans le corpus fourni de Steenwijck le Jeune dans lequel on dénombre plusieurs peintures de petit format semblables à la nôtre. Jacques Foucart, lorsqu’il évoque l’œuvre de Steenwijck, loue « sa facture perlée, son monde de clarté précise jusqu’au surréel, l’élégance nerveuse de ses architectures, il pointe la facture fine, que renforce le jeu des arêtes soulignées par de minces rehauts de lumière, une harmonie pure et perlée de tons gris et blonds, une perspective impeccable, et le sens du détail qui, un peu partout, meuble l’espace et limite l’évasion de l’œil ». Parmi les peintres qui s’illustrent dans le genre, tels Jan Juriaensz van Baden, Bartholomeus van Bassen ou les très célèbres Neeffs père et fils, Hendrick van Steenwijck père et fils font office de figure de proue.
Nous avons choisi de vous présenter notre précieux intérieur d’église dans un spectaculaire cadre en bois noirci à guillochure du XVIIe siècle.
Dimensions : 20 x 27,5 cm – 47,5 x 54,5 cm avec le cadre
Biographie :
Hendrick II van Steenwyck ou Steenwijck dit le Jeune (Anvers 1580 – Leyde 1649) succède à son père Hendrick I van Steenwyck à la tête de l’atelier de peinture qu’il dirige à Francfort. Il est un des pionniers dans la représentation d’intérieurs architecturaux. Steenwyck est actif à Francfort mais aussi à Anvers entre 1604 et 1615 où il collabore avec Frans I Francken, Denis van Alsloot ou Jan Brueghel l’Ancien qui peignent les figures dans ses intérieurs d’église. Introduit à la cour d’Angleterre, il s’installe à Londres vers 1615. Steenwyck collabore avec les peintres de la couronne et peint des décors pour Anton van Dyck et Daniel Mytens l’Ancien. Durant son séjour britannique, il rencontre son épouse Susanna Gaspoel elle aussi peintre d’architectures. Le couple d’artistes rentre à La Haye en 1638 puis s’installe à Leyde vers 1642. Steenwyck laisse une production importante et son œuvre a indéniablement influencé la peinture de Peeter Neef I que la postérité place injustement au premier rang des peintres spécialisés dans ce genre.
Bibliographie: