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De si charmants Petits Caprices
Respectueuse des deux toiles qui présentées au Salon des Artistes Français de 1876 et 1878 établirent, aux côtés de ses "Merveilleuses" (1870), la réputation sur la scène artistique parisienne comme internationale du peintre hollandais Fréderik-HendriK Kaemmerer (La Haye, 1839- Paris, 1902), cette charmante paire de tableautins restitue avec une semblable saveur les "Fantaisies rétrospectives"que sont ses Noces et Baptême (Folkestone, Collection Ian et Jane Bohwell ) sous Le Directoire.
A la vue de ces deux menus et jolis ouvrages où l'on retrouve, plus enlevées, les valeurs et qualités picturales caractéristiques de la manière de cet "émérite" artiste "au talent délicat, primsautier et gracieusement frivole"- l'aisance du trait, l'agrément du fond, le chatoiement des couleurs lumineuses et gaies, le piquant du détail-, "les Curieux dont le goût est resté fidèle aux toilettes " du temps des Incroyables et "des Merveilleuses, trouveront", comme le notait alors Paul Mantz*, "à se récreer".
Qualifiées par les Salonniers du moment (P.Mantz, Th. Véron,..) de "petits Bijoux",que mettaient donc en scène ces deux "scènes de moeurs de l'Epoque Directoire" ", peintes, dessinées et arrangées admirablement" par Kaemmerer dont, en 1882, au Salon des Artistes Francais (n° 3592) Mlle Angèle May-Daubive devait transposer sur plaques de porcelaine la "gracieuse invention"?
Ses Noces, tout à la fois badines et sentimentales, nous convie à suivre un fringant cortège nuptial traversant un parc de Tivoli bien parisien. D'oisifs promeneurs se divertissent du ballet des fiers bicornes, longues vestes à basques ou mousseuses capottes-cabriolets, froufrouantes étoles, fourreaux des invités coquettement endimanchés .Affables, les jeunes mariés les précédent: prévenant, le jeune homme avec une galanterie un tantinet démonstrative a liberé de son réticule, éventail et bouquet sa jolie épouse à l' attitude et regard plus évasive, langoureux. Enlacés, ils s'apprêtent à descendre un pierreux escalier sur les marches duquel picorent ou s'envolent des pigeons..
Riant et mutin est son Baptême saisissant, la cérémonie religieuse accomplie, sur le porche à colonettes d'une église gothique aux degrés parés " d'une vieille tapisserie jaunâtre", de précieux "miriflores" et "délicates figures de l'Epoque du Directoire " escortant le nouveau-né. "Toute glorieuse de son blanc fardeau", une nourrice en costume traditionnel est entourée à droite, de deux délicieuses jeunes femmes dont l'une "distribue des dragées à des polissons"; sur sa gauche, penché, le parrain, un sac de bonbons sous le bras le parrain, 'fait la risette" à l'enfant endormi. A l'arrière-plan, les invités badinent, échangent de galants propos.
On ne saurait résister à joindre à notre descriptif les quelques lignes rédigées en 1880 par Paul Hourie* dans son article consacré à F. K. Haemmerer dès lors considéré comme le "portraitiste attitré des élégances de 1793":
"Kaemmerer s'est adonné à la peinture de genre, et il s'est épris d'une belle passion, qu'il sait faire partager à tout le monde d'ailleurs, pour le Directoire, cette époque de la renaissance du goût dans le costume.Il n'est personne qui ne traduise plus fidèlement, qui en sache mieux rendre tout l' Esprit. Ses "Merveilleuses", son "Baptème", sa "Noce sous le Directoire sont de vrais bijoux de reconstitution historique. Ce qui plaît surtout, dans le talent du peintre, c'est la tournure élégante et spirituelle du'il sait imprimer à toutes ces oeuvres (..) La composition a beaucoup de charme tant par l'harmonie générale qui y régne que par les tonalités fraîches et aimables dont l'artiste sait les assaisonner. Ce qui nous surprend, c'est qu'avec tout cet esprit qu'il dispense et la recherche extrême qu'il met dans le choix de ses accessoires, il arrive à se mouvoir au milieu de cette époque si gracieusement du Directoire, en évitant l'écueil de se montrer précieux. La raison est sans doute (..) au goût parfait qui préside à tous ses arrangements. Ce goût est la qualité maîtresse de ce talent délicat.Kaemmerer est un Hollandais qui, sous ce rapport, est aussi parisien que le plus raffiné de nos artistes".
Assertion qu'à l'orée du XXe siècle Arsène Alexandre*, en regard du parcours artistique du peintre tragiquement disparu en 1902 dans son atelier parisien de la rue Vaugirard, formulait en ces termes:: éléve de Jean-Léon Gérôme "qui eut le bon esprit de ne pas marcher dans les souliers et les thèmes grecs de son maître", homologue de Charles Edouart Delort (1841-1895, Adrien Moreau (1843-1906), Maurice Leloir (1853-1956) adoubés en leurs temps, Kaemmerer fut une " sorte de Fortuny hollandais ayant passé par le boulevard de Clichy" .
A défaut de se prévaloir de posséder une toile de Marià Fortuny ou de F.H. Kaemmerer, on éprouvera plaisir et distraction devant ces tableautins aux détails piquants.
*Litttérature liée: Aguillar, Anne -Sophie, Frederik Hendrik Kaemmere (1839-1902) ", in L'Objet-d'Art , n° 121 ,Février 2018, pp. 38-40;- Alexandre, Arséne, Ombres et Figures: F.H.Kaemmerer, in : Le Figaro Illustré du 1ier janvier 1902;- Hourie, Paul, Kaemmerer, in: L'Estafette du 31 mai 1880; -Mantz, Paul, Le Salon de 1872",in: Gazette des Beaux-Arts, 1er janvier 1872, p. 471 -472.
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Matériaux:peinture àl' huile sur papier marouflée sur panneau de bois; Bois noirci et rehauts dorés.
Dimensions: hors cadre: H.: 12, 5 cm; L.: 8,5 cm Avec cadre: H.: 17 cm; L.: 14 cm.
Ecole de peinture franco-hollandaise de la seconde moitié du XIXe siécle. Non signé. Circa 1880
Bon Etat. Peintures restaurées;.A noter: menus accidents aux cadres.