Victoire à l’aile
Bronze doré, alt. cm 98
Diam. base en marbre cm 49
L’équilibre dans lequel repose cette victoire ailée, attroupée sur la seule cheville gauche, masque la solidité du bronze. La sculpture entière vibre de lignes de force opposées qui disposent des lancers plastiques audacieux, avec un effet d’animation exubérante. La Victoire, aux ailes pleinement ouvertes, chevauche le vent tout en tenant fermement une couronne de laurier, clair symbole de triomphe. Contrairement à la Justice, toujours debout sur ses deux jambes, la Victoire repose sur un seul pied, diversement en équilibre sur un globe, symbolisant d’un côté le vol transitoire, d’autre part l’autorité universelle dont il jouit. Dans la présente sculpture, on préfère une petite colonne à décor végétal, modulée comme si elle était une torche allumée, symbole supplémentaire de la force destructrice qui accompagne la victoire.
La base sur laquelle se dresse la Victoire, figurée à l’image d’un grand vase antique creusé, présente comme anse un couple de lionnes avec un miroir décoré en lys sur le dos; deux proto humains, de l’expression griphaine, signalent les autres parties de la bouche du vase. Sur le cou de la base émergent des têtes de lion, avalées par une ornementation végétale qui se trouve aussi sur le pied du vase.
Sauf pour quelques exceptions, l’iconographie de la Victoire ailée, dans cet exemple parfaitement respecté, provient d’un modèle unique transmis au cours des millénaires, aujourd’hui perdu. Réalisée en bronze doré, cette Victoire-modèle avait été fondue par les Tarantins en 280 av. J.C., pour célébrer la revanche sur les Romains à Heraclea ; fut volée par les Romains eux-mêmes en 272 av. J.-C. pendant les guerres pyrrhées, et en 29 av. J.-C., placée par Octave Auguste sur un autel placé dans la Curie Julia, le siège du Sénat inauguré par Jules César à l’intérieur du Forum. La Victoire tarantine fut détruite en 402 après J.-C. pour des raisons religieuses, En effet, depuis 395 le christianisme est devenu de jure credo officiel de l’empire et l’empereur Théodose n’avait pas l’intention d’épargner aucune dérogation païenne. Des pièces de monnaie et des reproductions sculpturales en conservèrent cependant la mémoire : d’une importance vitale fut la copie romaine d’époque impériale trouvée lors des fouilles de Pompéi, la plus ancienne existante, Aujourd’hui conservée au Musée Archéologique National de Naples. C’est à cette dernière que se rattachent toutes les copies ultérieures, y compris le présent bronze et les Victoires postérieures du monument en l’honneur de Victor-Emmanuel II à Rome. Le monument a été immédiatement renommé Vittoriano pour garantir la référence à ces sculptures, réalisées par les artistes Nicola Cantalamessa Papotti (Victoire avec palmier et serpent), Adolfo Apolloni (avec épée), Mario Rutelli et Arnaldo Zocchi (tous deux avec couronne de laurier). La Victoire ailée, métaphore séculaire de la suprématie de Rome, devint ainsi l’emblème de la paix universelle des peuples.
L’objet est en bon état de conservation