Jean Després (1889-1980) est l’un des artistes les plus novateurs des années 1920 et 1930 dans les domaines du bijou et de l’orfèvrerie. À 16 ans, il quitte Avallon et la boutique de cadeaux de ses parents pour commencer son apprentissage chez un orfèvre à Paris. Il complète sa formation par des cours de dessin des écoles de la Ville de Paris et fréquente le Bateau-Lavoir, où il rencontre Modigliani, Picasso, Signac, De Chirico et, surtout, Braque, qui devient bientôt son « meilleur copain ». Després travaille surtout l’argent, dont la blancheur, très à la mode dans les années 1930, est à peine altérée par les quelques touches qu’apportent des pierres semi-précieuses comme l’onyx, le corail, la turquoise, le lapis-lazuli ou la calcédoine, pour des prix qui restent, en cette période de crise économique aiguë, abordables, même s’il ne dédaigne pas non plus de réaliser sur commande des ouvrages de joaillerie, à base de pierres et de métaux précieux. L’artiste a gardé de son passage dans les ateliers de l’aviation militaire pendant la guerre de 1914-1918 un intérêt pour les formes mécaniques qu’il transpose dans ses bijoux. À partir de 1930, il crée les « bijoux moteurs » où on retrouve tout le vocabulaire de la mécanique : broche « bielle », broche « vilebrequin », bracelet « came », etc. Autant de pièces dont les formes inspirées de la mécanique suscitent en 1931, à l’exposition « L’Aéronautique et l’Art » du pavillon de Marsan, un intérêt mêlé de scandale. Comme les autres artistes de son temps, Després tisse des échanges avec le monde de l’art. Avec Étienne Cournault (1891-1948), peintre et graveur, qui affectionne le travail sur verre, il conçoit entre 1929 et 1934 les « bijoux glaces » en argent et verre, chef d’oeuvres de grâce et d’originalité. Ces compositions, qui jouent sur les reflets, sur des effets de transparence et de lumière, sont très remarquées, notamment par Joséphine Baker. Avec Jean Mayodon (1893-1967), futur directeur de la Manufacture de Sèvres, il monte, à partir de 1937, les plaques de céramique, d’inspiration principalement néoclassique, sur ses fameux « bijoux céramiques ». La participation de Després à l’Exposition de 1925 est restée anonyme, mais à partir de 1928 il expose dans tous les Salons officiels. Dès 1931, le critique Raymond Escholier écrit : « Després est en passe de devenir le plus grand des bijoutiers, le plus grand orfèvre. » Després est aussi l’un des maîtres d’oeuvre indiscutés du mouvement de renouveau de l’orfèvrerie de table et de l’orfèvrerie religieuse. Ses pichets, ses théières, ses candélabres, ses couverts, en étain surtout, mais aussi en argent, vermeil ou métal argenté, qu’il monte lui-même au marteau, se caractérisent par leurs formes simples, leurs volumes harmonieux, leur ornementation sobre. Bien représentée dans la collection des Arts Décoratifs grâce à un don important de l’artiste, l’oeuvre de Jean Després ouvrira l’exposition pour cette première rétrospective qui lui est consacrée. Sont également montrés les objets liturgiques, les reliures que l’orfèvre réalisera dans les années 1960.