Quand le Receveur des postes entra dans la salle à manger-séjour pour boire le pastis, Jean, qui dessinait ne pouvait imaginer ce qui allait se passer. Voyant son dessin, le receveur dit à Eugène qui l’avait invité : « Votre fils est très doué ! Vous devriez l’envoyer étudier à l’École des Beaux-Arts d’Avignon ! ». Une vie d’artiste ? Ce n’était pas ce qu’Eugène avait envisagé estimant qu’il était le meilleur de la classe, malgré qu’Eugène ne lui eut accordé que le cours du dimanche matin, on lui décerna le prix d’excellence. Encore jeune adolescent, Jean ne pouvait penser à la belle vie qu’il allait avoir : voyages, mais aussi rencontrer des gens prestigieux et toute l’école des grands peintres figuratifs et abstraits de New York. Une vie riche, loin du petit village de Provence où il avait grandi, mais aussi quelquefois difficile ; une vie d’artiste, riche et imprévue. (Robert Lamouroux)
Dans cette pièce, Jean-Louis Barrault s'inspire, comme il l'avait fait un an auparavant pour François Rabelais, de la vie et des créations d'Alfred Jarry. Le prologue, reprenant partiellement Ubu sur la Butte, évoque aussi le pataphysicien Faustroll, le ménage Ubu, sa gidouille, et différentes scènes de son œuvre mêlées à des moments du parcours du dramaturge. Le premier acte est centré sur «la bêtise militaire», passant de la vie au fantastique, et de la caserne au cauchemar de la bataille de Morsang, une bataille imaginée par Alfred Jarry et décrite dans un chapitre du roman La Dragonne, comme un récit héroïque. Après l'entracte, cette fusion entre la vie d'Alfred Jarry, en vrac, et son oeuvre se poursuit avec des défis sportifs et sexuels qui obsédaient cet auteur4,5,6.
Jean-Louis Barrault commente ainsi, pour Bertrand Poirot-Delpech, le thème de cette pièce, faisant allusion à ces événements de mai 1968 : « Le mal de Jarry, c'est déjà le mal de notre siècle. Son drame, c'est d'avance le nôtre : celui, surtout, d'une partie de la jeunesse, la désertion par nostalgie d'un certain idéal. D'où son agressivité anarchiste contre les institutions qui nous garrottent, mais aussi sa tendresse. Jarry est l'Ami, le Frère, qui rigole pour ne pas nous désespérer et qui meurt en pensant à nous, qui meurt et qui revit pour nous »7.