- Patine un peu usée et légèrement tachée par endroits, plinthe et socle en marbre avec quelques endroits abîmés, un coin anciennement restauré.
- L'extase de la joie maternelle -
Si Johannes Boese s'est surtout consacré à la sculpture monumentale et aux portraits représentatifs commandés par l'État, cette œuvre montre que l'artiste a également suivi ses propres idées. Bien qu'il ait suivi jusqu'au bout le style wilhelminien qu'il a contribué à façonner, il s'est également inspiré de l'Art nouveau.
Nous voyons une mère en marche, pleine de joie, qui soulève son petit dans les airs et le regarde dans les yeux avec bonheur. L'enfant lui rend son regard avec la même ferveur et tend une main vers sa mère. Ses doigts écartés expriment son désir non satisfait de la toucher et d'être ainsi tout près d'elle. Avec son front haut et ses larges joues, le garçon a l'air d'un putto laïc, ce qui trahit l'origine de Boese dans le baroque wilhelminien et confère à la représentation une dimension allégorique. De l'autre main, le garçon tient une poupée, ce qui lui donne une apparence tout à fait humaine. Ses mouvements de balancement tout à fait naturels le représentent comme l'incarnation même de l'enfant.
Le visage de la mère présente des traits antiques, avec son nez droit et allongé, tandis que son corps est représenté dans une nudité antique, ce qui confère à la sculpture une dimension allégorique, même du point de vue de la représentation de la mère. Le contrepoint de la sculpture classique, avec sa jambe d'appui et sa jambe de jeu, devient toutefois un excès. Son corps immobile en lui-même est pris d'un mouvement presque impétueux, porté par un mouvement intérieur.
La sculpture raconte une histoire dont le point culminant est représenté sous nos yeux : la mère a aperçu son fils de loin, s'est précipitée vers lui et l'a soulevé dans le ciel, pleine de joie et de fierté maternelle, tandis que le fils est rempli du sentiment d'être enfin de retour auprès de sa mère, qu'il veut également caresser.
Si l'image de la maternité est marquée par Marie et l'enfant Jésus, Boese crée ici une image de la joie maternelle qui prend des traits extatiques et dansants, comme si la mère exécutait une danse de joie culminant au moment montré. En reproduisant les différentes vues de la sculpture en bronze, le mouvement de danse et d'extase est sans cesse relancé par le spectateur.
La beauté du corps féminin, modelé de manière naturaliste, irradie le bonheur maternel, illuminé par la patine dorée. L'éros de sa beauté nue se fond dans la joie comblante du fruit de ses entrailles.
Sur l'artiste
Après une formation de sculpteur sur bois, Johannes Boese a d'abord fréquenté l'école d'arts appliqués de Gleiwitz. Suivant son véritable talent de sculpteur, il se rendit en 1877 à l'Académie des Beaux-Arts de Berlin où il étudia jusqu'en 1883 avec Fritz Schaper et Albert Wolff, dont il devint le maître-élève. Wolff était l'un des principaux artistes de l'école de sculpture berlinoise fondée par Johann Gottfried Schadow et son élève Christian Daniel Rauch.
Avec l'œuvre Narcisse, créée en 1883 et récompensée en 1888 lors de l'exposition universelle de Melbourne, Boese obtient une première reconnaissance. Des commandes plus importantes suivirent, comme le relief réalisé en 1885, « Accueil des Huguenots par le Grand Electeur », à la cathédrale française sur le Gendarmenmarkt. En 1887, il créa, avec l'aide d'une loupe de lecture, la statuette en bronze de l'empereur Guillaume Ier, qui fut achetée en plusieurs exemplaires par Guillaume II et fit de Boese l'un des artistes préférés de l'empereur, ce qui lui valut de nombreuses commandes d'État. C'est ainsi qu'il a pu créer, sans devoir participer à la procédure de candidature, le quatrième groupe de monuments pour la Siegesallee de Berlin, très renommée à l'époque. Sa statue d'Albrecht II, achevée en 1898, en compagnie d'Eike von Repgow, l'auteur du miroir de Saxe, et de Hermann von Salza, le plus important grand maître de l'Ordre Teutonique, fit de Boese l'un des artistes d'État les plus demandés. Par la suite, il réalisa surtout des sculptures monumentales représentant des potentats de la maison souveraine. Pour son monument à l'empereur Frédéric III, érigé en 1902 à Posen, Boese fut nommé professeur à l'Académie des Beaux-Arts de Berlin. L'un de ses élèves était Georg Meyer-Steglitz, qui a également réalisé des œuvres monumentales, mais qui sont aujourd'hui en grande partie perdues.