- Carton légèrement bombé ; petite retouche discrète au milieu du bord supérieur du tableau.
- Été indien -
Le tableau a certes l'air d'une esquisse, mais comme le prouve la signature en bas à droite, Frederick Vezin l'a néanmoins considéré comme une œuvre d'art achevée. C'est précisément cet aspect esquissé qui permet de comprendre le tableau, certainement réalisé dans le paysage lui-même : les phénomènes naturels doivent être représentés artistiquement au moment de leur observation. Cela ne se fait pas en dessinant méticuleusement la nature, mais, suivant ici la leçon de l'impressionnisme français, en illustrant la nature dans sa plénitude visuelle. L'œil de l'artiste plonge en quelque sorte dans la visualité de la nature, qui devient manifeste sous forme d'image par sa main. C'est pourquoi la peinture n'est pas un reflet du paysage, mais son intensification artistique.
L'intensification passe également par le fait que l'avant-plan du tableau se soustrait - conformément au champ visuel - à une observation rapprochée orientée sur les détails. La peinture appliquée à la spatule, dont la structure verticale correspond à la structure de la végétation florale, rend la nature perceptible au toucher dans sa substance colorée.
En même temps, le premier plan, qui reste indéterminé dans sa figuration concrète, crée un espace atmosphérique qui s'associe au véritable protagoniste du tableau : le groupe d'arbres qui flamboie dans les tons rouges et bruns. Ici aussi, les feuilles sont plus mouchetées que clairement dessinées. Cette « esquisse » ouvre justement une expérience visuelle qui rend le paysage accessible dans sa plénitude visuelle et en révèle ainsi l'essence.
Au-delà de cette richesse, le paysage est présenté comme une structure ordonnée, dans la mesure où la composition de l'image laisse apparaître la composition du paysage. Ainsi, le groupe d'arbres forme une ombre vert foncé distincte, qui se répète dans les ombres portées des arbres situés derrière. Il en résulte un axe diagonal qui structure l'image, et qui a été formé ainsi par le paysage lui-même.
En y regardant de plus près, on se rend compte que ce paysage est cultivé : une clôture traverse l'image de gauche à droite dans la partie inférieure, et un bas mur de pierres dans la partie supérieure, deux éléments qui créent également une forte impression de composition. Sur le sommet de la colline se trouve la maison en pierre la plus claire de l'image, intégrée dans le paysage. La nature et la culture forment ici une synthèse harmonieuse, ce qui confère au tableau un aspect arcadien.
Pour donner le plus d'espace possible au paysage, la ligne d'horizon est élevée, mais la conception du ciel revêt également une importance décisive. Les nuages qui traversent un ciel d'un bleu éclatant, associé aux formes des arbres, créent une impression de calme et de sérénité. Pour un regard européen, un tel ciel évoque un paysage d'été. En conséquence, le ciel bleu est réservé à l'été dans le cycle des saisons et l'impressionnisme français est avant tout une ode à l'été. Sur le tableau de Vezin, le ciel bleu étincelant se trouve toutefois au-dessus d'un paysage d'automne dont les arbres sont même en partie déjà défoliés. On peut donc supposer que le tableau n'a pas été réalisé en Europe mais aux États-Unis et qu'il illustre l'été indien devenu proverbial, ce qui fait de Frederick Vezin un pionnier de la peinture de paysage américaine.
Sur l'artiste
Frederick Vezin était le fils d'un Français émigré aux États-Unis et d'une mère d'origine allemande. Cette origine mixte le prédestinait à promouvoir les échanges artistiques entre l'Ancien et le Nouveau Monde. Après avoir passé une partie de sa scolarité en Allemagne, il commença, en 1876, à l'âge de 20 ans, à étudier à l'Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf, où il suivit entre autres les cours de Peter Janssen l'Ancien, Eduard von Gebhardt et Wilhelm Sohn. Il termina ses études en 1883, s'établit à Munich et revint à Düsseldorf en 1895, où il vécut jusqu'à sa mort en 1933.
Américain de naissance, il a voyagé à plusieurs reprises aux États-Unis, où il est devenu un portraitiste et un peintre mondain très demandé. Mais c'est surtout dans la peinture de paysages que son talent artistique s'est révélé. Formé à l'impressionnisme français, il a développé une virtuosité dans l'utilisation des couleurs et une liberté dans le maniement du pinceau, qui restent cependant liées au motif du paysage, de sorte que ce dernier est exploité d'une manière entièrement nouvelle. Frederick Vezin s'est principalement intéressé aux paysages de son pays natal et est ainsi devenu un pionnier de la peinture de paysage moderne américaine.
« Frederik Vezin, né à Philadelphie en 1859, est tout à fait moderne dans sa conception coloriste, mais aussi dans le choix de ses motifs [...]. Il a créé des œuvres qui révèlent une grande compréhension du paysage. »
Friedrich Saarschmidt