- Minimement assombri. Encadré sous verre dans un passe-partout.
- L'essence de la cruche d'argile révélée par la lumière du soleil -
Hans Richard von Volkmann illustre une nature morte avec la technique de sa prime jeunesse - crayon et aquarelle. Il ne s'agit toutefois pas d'une nature morte traditionnelle dans un intérieur, mais d'une représentation située en pleine nature, qui a en outre été réalisée en plein air et non dans un atelier. Il s'agit donc d'une peinture en plein air caractéristique de l'œuvre de von Volkmann, qui pourrait avoir été réalisée dans la colonie de peintres de Willingshausen, puisque la peinture en plein air y était pratiquée de manière programmatique et que l'artiste y a séjourné cette année-là.
Et en effet, avec ce tableau, on a sous les yeux un manifeste de la peinture en plein air. Von Volkmann démontre que le passage de l'atelier à la lumière de la nature conduit à une toute nouvelle qualité de l'art. Pour apporter cette preuve par l'image, il établit un lien avec le genre de la nature morte, que l'on peut qualifier de sujet d'atelier par excellence. De plus, dans la nature morte de type classique, la lumière joue un rôle essentiel. Elle est le véritable acteur de la nature morte. Et c'est justement ce moment essentiel pour la nature morte que von Volkmann met en évidence pour montrer le potentiel de la peinture en plein air : Il présente les objets tels qu'ils se présentent à la lumière du soleil. La datation au mois de février et les branches dénudées au premier plan indiquent qu'il s'agit d'une claire journée d'hiver sous un soleil éclatant. La plante gracieuse au premier plan, tout comme la cruche, projette une ombre portée aux contours bien définis. Mais c'est sur la cruche elle-même que l'ombre portée est la plus prononcée : La partie inférieure de l'anse semble presque noire, ce qui rend la partie supérieure, et donc la cruche elle-même, d'autant plus lumineuse. Le rayonnement des objets sous la lumière du soleil est également visible sur le banc. Comme phénomènes complémentaires aux zones d'ombre, des arêtes lumineuses sont visibles sur les planches des sièges et le pied supérieur du banc rayonne entièrement dans la lumière. Pour cette intensité lumineuse, von Volkmann active le blanc clair du support de peinture.
En représentant les objets dans la lumière éclatante du soleil, von Volkmann démontre par l'image que cette même qualité de lumière n'est présente qu'en plein air. Et cette lumière conduit à une nouvelle vision des objets eux-mêmes. La cruche sur le banc semble être un arrangement fortuit, comme si l'artiste était arrivé sur le chemin, avait vu cette nature morte non intentionnelle et l'avait capturée avec fascination. Et cette fascination est accompagnée d'un moment de reconnaissance qui se rapporte aux objets eux-mêmes. Ce n'est que leur rayonnement lumineux dans la lumière du soleil qui révèle leur véritable nature. La lumière du soleil permet ainsi aux objets de se révéler à eux-mêmes. Grâce à la lumière du soleil, qui n'est pas présente dans l'atelier, la nature morte acquiert une toute nouvelle dimension de réalité, qui se reflète également dans les couleurs traversées par la lumière du soleil : Le banc et la cruche forment un contraste harmonieux entre le gris et le rose, soutenu par le vert de la prairie suggérée.
Le fait que l'aquarelle n'ait pas été réalisée entièrement participe également à la mise en valeur de la cruche en tant qu'objet central du tableau. Ce non finito confère à l'image un caractère processuel qui montre que quelque chose de processuel a été représenté, dont la temporalité a été rendue permanente par l'artiste. C'est pourquoi von Volkmann a signé le tableau et l'a daté au mois près.
Sur l'artiste
Dès l'âge de 14 ans, von Volkmann a réalisé ses premiers essais artistiques. Il a représenté sa région natale de Halle dans un grand nombre d'aquarelles. Cela a posé les bases de sa future peinture en plein air.
En 1880, ses débuts autodidactes se professionnalisent avec son admission à l'Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf. Il y étudia jusqu'en 1888 avec Hugo Crola, Heinrich Lauenstein, Johann Peter Theodor Janssen et Eduard von Gebhardt. Il rejoint ensuite l'Académie de Karlsruhe pour y devenir maître-élève de Gustav Schönleber jusqu'en 1892.
En 1883, il vint pour la première fois à Willingshausen, la plus ancienne colonie de peintres d'Allemagne, à l'instigation de son ami d'études Adolf Lins. Pendant plus de 25 ans, il y retournera régulièrement et y habitera parfois pour se consacrer entièrement à la peinture en plein air.
Von Volkmann devint rapidement un peintre paysagiste très demandé, qui fit son entrée dans les musées allemands. En 1902, il devint professeur et, à partir de 1906, membre du comité directeur de l'Union des artistes allemands. Grâce à son père, Richard von Volkmann, il avait en outre des affinités avec l'illustration de livres. Sous le pseudonyme de Richard Leander, il avait déjà publié les « Träumereien an französischen Kaminen » (Rêveries aux cheminées françaises), maintes fois rééditées et parues pour la première fois en 1871, que son fils illustra, parmi une multitude d'autres œuvres.
« Au fil des années, il enrichit ses moyens d'expression artistiques, formés au réalisme et au naturalisme, par des influences de l'Art nouveau ainsi que d'autres tendances modernes, et il sut transformer l'observation objective de la nature en images d'ambiance subjectives ».
- Heinz Bischof.