Cette sculpture, en marbre blanc statuaire de Carrare, de la fin du XIXe siècle représente une scène allégorique mettant en avant Venus et son fils et serviteur, Éros.
Venus délicatement penchée vers Eros, a un bras levé en arc de cercle au-dessus de sa tête, ce qui donne un effet de légèreté et de fluidité à l’ensemble. Son autre main est tendue vers son fils, ce qui pourrait suggérer un geste éducatif alors que son sourire doux, presque énigmatique, dégage une sérénité et une grâce naturelle.
Éros semble interagir avec sa mère en la regardant. Sa position évoque une innocence et une curiosité enfantine. Il a les main liées au tronc d’un arbre avec un ruban.
La sculpture repose sur une base ronde en marbre "vert de mer", qui contraste avec la blancheur du marbre de Carrare tout en mettant en valeur la composition.
La représentation d’Éros enchaîné est un motif intéressant qui peut être interprété symboliquement dans le contexte de sa relation avec Vénus dont il est son fils et son serviteur:
Suivant le mythe de Psyché, Vénus ordonne à Éros de faire tomber Psyché amoureuse d’un monstre par vengeance, mais Éros désobéit en tombant lui-même amoureux d’elle. Éros, bien qu’il soit le dieu de l’amour, est pris au piège par ses propre sentiments. Il devient prisonnier de son amour pour Psyché, ce qui l’amène à défier l’autorité de Vénus et à souffrir des conséquences de cette passion. Il est “enchaîné” par l’intensité de ses émotions. Ces chaînes symbolisent la complexité des relations amoureuses, où le désir peut captiver même les forces les plus puissantes. Éros, bien qu’il incarne la liberté du désir, est lui-même lié aux volontés des autres et aux passions qu’il ne peut éviter.
Eros est adossé à la figure centrale, créant une interaction captivante qui attire l’œil du spectateur. Il est représenté de façon réaliste, avec des détails anatomiques soignés, notamment le galbe de ses membres et l’arrondi de son ventre, caractéristiques de l’art de représenter l’enfance dans la sculpture classique.
La main de la figure féminine semble tenir le ruban avec lequel Eros est attaché au tronc d’un arbre comme si elle essayait de le libérer, ajoutant un aspect protecteur et maternel à l’œuvre. Cela souligne la complicité entre les deux personnages et symbolise peut-être la protection divine ou l’amour inconditionnel.
Cette œuvre présente des caractéristiques propres aux sculptures académiques, où l’idéalisation des corps et le respect des proportions classiques sont primordiaux. Les détails du visage, des cheveux, et des muscles délicatement sculptés montrent une grande attention au réalisme, propre au travail du sculpteur Emile BOISSEAU. La précision des détails et la capacité à rendre l’émotion à travers l’expression témoignent d’une grande maitrise
Boisseau a habilement travaillé les détails des yeux, des lèvres et des pommettes pour créer un réalisme délicat. La chevelure est richement travaillée, ornée de fleurs délicatement sculptées, qui ajoutent une touche de romantisme et renforcent l’aspect divin de la figure. Les mèches sont légèrement ondulées, tombant avec fluidité, témoignant du savoir-faire technique du sculpteur. Le poli de la surface est lisse et impeccable, donnant à la pierre un aspect de peau douce et lumineuse. Le sculpteur a utilisé des techniques de polissage qui mettent en valeur la translucidité naturelle du marbre, créant ainsi une impression de vitalité et de chaleur.
Émile André BOISSEAU (1842-1923)
Il expose régulièrement au Salon parisien à partir de 1868, après avoir étudié la sculpture à l’école des Beaux-Arts sous la direction de Dumont et Bonnassieux. Il affectionne particulièrement la taille du marbre, qu’il marie volontiers au bronze, voire aussi à l’onyx.
Parmi ses envois, l’Amour enchainé de 1891 et Le Crépuscule, groupe en marbre de 1883.
En 1882, il sculpte une statue de Beaumarchais pour la façade de l’hôtel de ville de Paris. Une version en marbre de sa Défense du foyer de 1884 est acquise par la Ville de Paris qui l’érige dans le square du Champ-de-Mars.
En 1888, il est nommé directeur du musée d’Art et d’Histoire Romain Rolland à Clamecy. Il offre plusieurs de ses sculptures à l’établissement.
Vice-président de la Société des artistes français, président du syndicat de la propriété artistique, officier de la Légion d’honneur depuis 1900, Émile Boisseau meurt le 17 février 1923 dans son hôtel parisien.