Le Drapeau à la fenêtre, 1942
signé et daté en bas à droite
huile sur panneau de carton
41 x 32,8 cm
encadré 62 x 54 cm
Ce beau tableau est très caractéristique du style original et personnel de Marc Mouclier. L'influence de son ami Edouard Vuillard est perceptible dans le cadrage et la touche, mais le magnifique jeu de couleurs lui est entièrement propre. Le tempérament fougueux et profondément moderne de Mouclier apparaît pleinement.
Un autre élément est la date du tableau, 1942, qui est évidemment très importante : la France est occupée par les Allemands et le pays est à genoux. Il s'agit clairement d'une méditation sur ces temps difficiles.
Le paradoxe est que ce tableau est plein de joie et de lumière, et le symbole de la fenêtre qui s'ouvre sur le jardin ensoleillé est un signe d'espoir pour des jours meilleurs.
L'artiste a mis son talent de composition et ses couleurs vives au service d'une œuvre d'une indéniable modernité.
Marc Marie Georges Mouclier est né à Aigre, Charente, le 19 janvier 1866. Il est le fils d'un notaire installé dans la ville. Après un passage à l'Académie Julian, il est admis aux Beaux-Arts de Paris en 1887, où il suit les cours de Gustave Boulanger, Jules Lefebvre et Luc-Olivier Merson. Il expose pour la première fois un portrait de son père au Salon des artistes français en 1889, puis revient l'année suivante avec un portrait intitulé Le Gardien de l'École des Beaux-Arts, qui représente un homme défiguré après une chute, ce qui provoque un petit scandale : il ne peut plus y exposer ses œuvres. Il se présente sans succès au concours du prix de Rome en 1892, présenté par Jean-André Rixens. À la fin du XIXe siècle, Mouclier aurait séjourné dans un chalet à Villejésus, où tous ses amis artistes lui rendaient visite.
À partir de 1893, il expose au Barc de Boutteville, dans le cadre de la 5e exposition des peintres impressionnistes et symbolistes ; il est à nouveau présent à la 9e exposition, dont il réalise l'affiche. Il se lie d'amitié avec Édouard Vuillard, Pierre Bonnard, Ker-Xavier Roussel, Louis Valtat et Maurice Denis. C'est également dans cette galerie parisienne qu'il rencontre Alfred Jarry.
Mouclier commence à illustrer des périodiques comme Le Rire, travaille un temps à la promotion de Félix Marot, homme politique local et propriétaire du Journal de Ruffec (1897), et surtout devient le compagnon de route de Georges Bans, fondateur en mars 1895 de La Critique, revue illustrée de lithographies artistiques et dans laquelle apparaît le poète Alcanter de Brahm. Parallèlement, il entame une importante série d'eaux-fortes (gravures sur bois, eaux-fortes, pointes sèches) et de dessins lithographiques. En 1895, Émile Straus, dit « Papyrus » (1865-1939), publie les premières estampes de Mouclier illustrant Das lied von der Glocke de Schiller. Début 1896, il en expose deux chez Siegfried Bing, ainsi que des dessins de vitraux. Il collabore ensuite à la Revue blanche avant de lancer en octobre suivant son propre périodique, L'Omnibus de Corinthe, véhicule illustré d'idées générales, avec Bans, Édouard Couturier, Désiré Fortoul, Ibels, Jarry, Paul Redonnel, Straus, Valtat, Willy et Jossot. En 1903, il publie avec Auguste Blaizot une suite de 25 pointes sèches intitulée Le Génie des poètes français.
Mouclier se retire alors du marché de l'illustration et se consacre à la peinture. Il expose au Salon des Indépendants de 1903 à 1905, puis retourne vivre en Charente avec sa famille, avant de s'installer définitivement à Viroflay. Fin 1930, il revient au Salon des Indépendants après vingt ans d'absence, s'étant consacré à une carrière de décorateur. En 1937-1938, deux grandes expositions parisiennes à la galerie Le Niveau montrent l'étendue et la variété de son art, considéré comme singulier et assez avant-gardiste.
Démuni et oublié, Marc Mouclier meurt le 22 février 1947 dans le 14e arrondissement de Paris.