Esquisse d’une tête de cheval
Huile sur toile marouflée sur panneau,
28 x 24 cm
Signée et datée 1909 en bas à gauche
Provenance :
Collection particulière
Raimond Lecourt, peintre havrais formé dans la tradition académique, s’impose comme une figure significative de l’art français de la première moitié du XXe siècle. Élève de Charles Lhuillier à l’École des Beaux-Arts du Havre, il développe très tôt une prédilection pour les sujets animaliers et les scènes de genre, influencé par le naturalisme pictural qui marque son époque.
En 1899, Raimond Lecourt obtient le prix d’honneur du cours supérieur avec la médaille d’argent de la Ville. Cette distinction lui ouvre les portes de l’École des beaux-arts de Paris grâce à une bourse municipale. Il intègre alors l’atelier du grand peintre Léon Bonnat, où il perfectionne son art. À Paris, il retrouve plusieurs artistes havrais qui l’y avaient précédé : Othon Friesz, Raoul Dufy et les frères René et Henri de Saint-Delis. Ce cadre artistique et intellectuel enrichit son regard, tout en le confirmant dans son attachement à un style figuratif empreint de naturalisme.
Au fil des années, Lecourt atteint la pleine maîtrise de son talent. Sociétaire de la Société des artistes français, il expose régulièrement au Salon des indépendants et envoie ses œuvres aux principaux Salons de l’époque. Sa réputation dépasse rapidement les frontières françaises, et ses tableaux trouvent leur place dans des collections prestigieuses au Danemark, en Allemagne, aux États-Unis, au Japon et en Grande-Bretagne. Dans ce dernier pays, son talent est particulièrement apprécié : les chiens de la duchesse de Manchester lui doivent même leur immortalité à travers ses peintures.
Cette Tête de cheval, exécutée en 1909, illustre la virtuosité de Lecourt dans l’art de capturer la force et la noblesse des animaux. L’œuvre révèle une palette chaude, où dominent les bruns profonds, rehaussés par des touches d’ocre et de rouge, qui animent le pelage de l’animal. L’arrière-plan, traité avec simplicité dans des tons bleu clair et blanc, met en exergue le sujet principal tout en créant une atmosphère apaisée et lumineuse.
Le regard du cheval, calme et attentif, témoigne du talent de Lecourt à saisir l’essence psychologique de ses sujets. La texture du pelage, rendue par des coups de pinceau souples et vibrants, confère une impression de vie et de spontanéité. Par ce traitement, Lecourt s’inscrit dans la continuité des grands peintres animaliers tels que Rosa Bonheur et Édouard Detaille, tout en imprimant à son œuvre une sensibilité personnelle et une grande sincérité d’expression.
Dès son plus jeune âge, Lecourt montre un goût précoce pour le dessin. Pourtant, son passage à l’école communale avait été sans histoire, à cela près que son instituteur, fermé aux beautés du croquis, sanctionnait avec sévérité les « gribouillages » dont il parsemait les marges de ses cahiers. Cette anecdote souligne l’irrésistible attirance de Lecourt pour l’art dès ses premières années, un talent qui trouvera sa pleine expression dans ses œuvres matures.
Le choix d’un format restreint, 28 x 24 cm, confère à ce tableau une intimité particulière. Il pourrait s’agir d’une étude préparatoire à une œuvre plus ambitieuse, mais il se suffit à lui-même par la précision et la maîtrise dont il témoigne.
Dans le contexte de la Belle Époque, où les scènes animalières connaissent un regain d’intérêt, Lecourt se distingue par sa capacité à transcender la simple représentation réaliste pour atteindre une dimension émotionnelle et narrative. Cette esquisse constitue une illustration magistrale de son amour pour le monde animal et de son talent à en restituer la beauté brute et l’âme.