Portrait du facteur de clavecin Joseph Treyer
Signé et daté « C.N. Cochin f. delin. 1782 »
Graphite, traits d'encadrement à l'encre brune, diamètre 75 mm (2,95 pouces) ; présenté dans un cadre circulaire doré de forme néoclassique et avec un montage lavé
Provenance
Collection particulière, Paris
Gravé
Au revers, par Simon-Charles Miger (1736–1828), gravure et eau-forte, 105 x 99 mm, 1782 ; une épreuve est conservée dans les collections du Rijksprentenkabinet, Rijksmuseum, Amsterdam, inv. n° BI-1958-0262-35-4 ; Emile Bellier de la Chavignerie, Biographie et catalogue de l'œuvre du graveur Miger, Paris 1856, p. 137, cat.no. 285
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Charles-Nicolas Cochin est considéré comme l’un des plus grands créateurs de goût de la France du milieu du XVIIIe siècle. Il fut formé par son père, le graveur Charles-Nicolas Cochin père (1688-1754), et par sa mère, Louise-Magdeleine Horthemels (1686-1767), qui fut elle-même une graveuse de premier plan à Paris pendant une cinquantaine d’années.1 Il fut par la suite formé par Jean II Restout.
Cochin réalisa sa première gravure à l’âge de douze ans et, à partir de 1737, il fut employé par le jeune roi Louis XV pour exécuter des gravures commémorant des naissances, des mariages et des funérailles célébrées à la cour. En 1749, Cochin fut choisi par Mme de Pompadour pour accompagner son frère Abel Poisson, futur marquis de Marigny, lors d’un Grand Tour en Italie. En 1752, il fut en outre nommé conservateur des dessins du roi et se vit attribuer un appartement au Louvre. Quelques années plus tard, il fut nommé « administrateur des arts » du roi et, à ce titre, commanda des œuvres à d’autres artistes pour les résidences royales. Cochin était critique à l’égard du style rococo et fut l’un des premiers défenseurs du néoclassicisme, obtenu grâce à la précision technique.
En tant que dessinateur indépendant, Cochin est surtout connu pour ses portraits délicats et précis, souvent de profil, comme dans le cas présent. Ce portrait bien observé, dessiné en 1782, représente le facteur de clavecins Joseph Treyer (mort en 1788).2 Né en Suisse, Treyer est venu à Paris pour être apprenti chez son oncle, le facteur de clavecins Jean Keiser, dit L’Empereur. Treyer est mort veuf sans descendance en 1788, et l’inventaire des biens matériels de sa maison de la rue des Rats (aujourd’hui rue d’Arras) répertorie de nombreux clavecins et autres instruments, terminés ou non.3
Ce dessin magnifiquement conservé est un merveilleux exemple du talent de dessinateur de Cochin, mais il est également rare qu’il représente un artisan plutôt qu’un membre de l’élite – et il est encore plus intéressant que le dessin ait été gravé par Simon-Charles Miger (1736–1828) la même année, 1782, ce qui indique que Treyer était en quelque sorte une célébrité. Notre dessin peut par exemple être comparé au Portrait d’un homme inconnu de Cochin conservé au Metropolitan Museum de New York.4
1. Pour Cochin, voir Christian Michel, Charles-Nicolas Cochin et le livre illustré au XVIIIe siècle : avec un catalogue raisonné des livres illustrés par Cochin, Genève 1987 et Christian Michel, Le voyage d’Italie de Charles-Nicolas Cochin (1758) : édité en fac-similé avec une introduction et des notes, Rome 1991.
2. Pour Treyer, voir Pierre J. Hardouin, « Harpsichord making in Paris : XVIIIe siècle », The Galpin Society Journal, vol. 12, mai 1959, p. 73-85.
3. Hardouin, op. cit., p. 73-77.
4. Signé et daté 1776 sous sa forme habituelle, également visible sur notre dessin ; graphite, diam. 115 mm, inv. Non. 1970.41.2; Jacob Bean et Lawrence Turčić, Dessins français du XVe au XVIIIe siècle au Metropolitan Museum of Art, New York, 1986, cat. n° 72, p. 71, ill.