L'athlète, représenté semi-nu, adopte une posture triomphante, les bras levés dans un geste exalté, comme s'il atteignait le sommet d'une lutte de longue haleine. Son équilibre précaire sur un pied, posé sur un socle géométrique d'inspiration cubiste, crée une tension palpable et donne une impression de mouvement perpétuel. L'influence d'Antoine Bourdelle, mentor de Dušek pendant ses études à Paris, est évidente dans la précision anatomique et l'intensité psychologique de la figure.
La sculpture a été créée à Tábor et coulée dans la célèbre fonderie Franta Anýz à Prague. Elle a acquis une reconnaissance internationale lorsqu'elle a été exposée à la XVe Biennale de Venise en 1926. Elle a également reçu une médaille de bronze au concours d'art des Jeux olympiques de Paris en 1924 et une médaille d'argent au Salon de Paris en 1925, consolidant ainsi la place de Dušek dans le monde de la sculpture moderne.
Biographie
Né en 1891 dans le village de Makov, près de Jistebnice, Jan Vítězslav Dušek devint l'un des sculpteurs tchèques les plus marquants du début du XXᵉ siècle. Il entama son parcours artistique à l’Académie des beaux-arts de Prague, où il perfectionna sa technique, avant de poursuivre ses études à l’Académie des beaux-arts de Vienne. Mais c’est à Paris, au début des années 1920, que son œuvre prit un tournant décisif. En étudiant sous la direction d’Antoine Bourdelle, élève d’Auguste Rodin, Dušek absorba la philosophie de son maître, axée sur le mouvement expressif, la précision anatomique et la composition dynamique—des éléments qui allaient devenir la signature de son style.
En 1922, Dušek s’établit à Tábor, où il ouvrit son atelier, trouvant dans cette ville un véritable foyer d’inspiration. Il s’imprégna des thèmes du sport, du mouvement et de l’effort physique, des sujets qui résonnaient avec les grandes tendances de la sculpture européenne, désireuse de capter l’énergie brute de la vie, entre Futurisme et Expressionnisme.
Son talent fut rapidement reconnu à l’international, notamment pour sa capacité à transposer l’esprit du sport en sculpture. En 1924, il franchit une étape majeure en remportant une médaille de bronze aux Jeux olympiques de Paris avec L'Archer (Bogenschütze), une distinction prestigieuse à une époque où l’art et le sport étaient envisagés comme des expressions parallèles de l’excellence humaine. L’année suivante, son œuvre Le Coureur (Der Läufer) reçut une médaille d’argent au Salon de Paris, renforçant encore sa réputation de sculpteur du dynamisme. Cette reconnaissance culmina en 1926, lorsqu’il fut invité à exposer à la Biennale de Venise.
Ses sculptures se distinguent par leur tension musculaire, leur rythme et leur intensité psychologique. Plus qu’une simple capture de la force physique, elles traduisent l’intensité intérieure—la volonté, l’ambition et l’exaltation de l’effort. Son habileté à figer le mouvement dans le bronze confère à ses figures une sensation de perpétuelle impulsion, saisissant l’instant juste avant un saut, une foulée ou un triomphe.
Dédié à son art jusqu’à la fin de sa vie, Dušek s’éteignit en 1966 à Tábor, laissant derrière lui un héritage de sculptures puissantes et expressives qui continuent de captiver le public. Pour lui, le mouvement n’était jamais statique, la force jamais purement physique—son œuvre demeure un témoignage de la persévérance humaine, du triomphe et de la quête incessante de grandeur.