D'une grande douceur plastique, cette statuette en bronze a pour sujet une des plus fameuses et fascinantes figures de la littérature grecque: Sapphô, de Lesbos (VIIe-VIe siècles av.J.-C.).
Somptueusement vêtue d'un luxuriant himation* dévoilant un fin chiton brodé,légèrement bijoutée,, la chevelure maintenue en un élégant chignon par un cécryphale , la Poétesse de l'Ile de Mytilène est représentée assise, le buste sensiblement de trois-quart, sur une couche de type Klimé au piètement orné de motifs de Grecques, palmettes stylisées et à la traverse silhouettée d'Ephèbes Musiciens jouant du *Salpinx, du Buccin. Une main portée sous le menton-pour signifier la recherche de l'inspiration poétique-, , l'autre enserrant un rouleau,la Muse du Monde Antique, le regard rêveur, semble plongée dans une élègiaque réflexion. A ses côtés, opulemment drapée, se dresse la légendaire Lyre façonnée par Hermès, fidèle compagne et attribut majeur de la Poétesse musagète.
Son attitude tout à la fois noble et languide est mise en valeur par la sage inflexion donnée à ses jambes, le jeu harmonieux de ses bras-l'un, souplement replié vers le torse, l'autre, nonchalamment appuyé sur la Lyre-, la souplesse de son altier port de tête, la douce sensualité de son épaule dénudée.
Telle qu'elle est ici représentée, cette effigie toute en finesse de Sapphô évoque la personnalité tour à tour inspirée et inspiratrice de celle qui aima à composer d' intimistes vers,de nuptiaux épithalames -auxquels renvoient les figures des Musiciens profilés "A L'Antique" sur la fâce du Klimé). Elle peut aussi symboliser, au vu de la période de sa création, un des iconiques épisode de la vie de la Poétesse: le moment où, délaissant sa Lyre, Sapphô s'abandonne à une mélancolique songerie après avoir transcrit sur un velin des vers enflammés composés pour Phaon, le bel et jeune Batelier de Mytilène désavouant les tendres ardeurs de son amour.
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Non sans anologie avec l'une des oeuvres les plus célébres de James Pradier (1792-1852), Sapho méditant (Paris, Musée d'Orsay, Inv. RF 2990) présentée au Salon de 1852 (marbre,n° 1520)**, cette statuette des plus raffinées s'inscrit pleinement par sa composition alliant élégance formelle et grace des lignes, gestuelle réfléchie et sage sensualité, poésie du sentiment dans la mouvance de l Atticisme parisien qui sévit dans l' Ecole de sculpture Française des années 1855-1860. Parmi les protagonistes et adeptes de ce mouvement - tant sculptural que pictural- aussi désigné sous le terme de Néo-Grec, on mentionnera notamment Auguste Clésinger (1814-1883),Jules Cavelier (1814-1894), E.Antoine Aizelin (1821-1902)Jules Salmon (1823-1902), de P.Alexandre Schoenewerk (1820-1885) lesquels s'attachèrent aussi à la représentation de l'iconique Egèrie littéraire du Monde Antique.
Petit "Bijou Néo-Grec", cette statuette de Sapphô modelée avec sensibilité séduira, comme l'énonçait Georges Lafenestre, "Tous ceux qui ont le goût des belles formes et qui sont sensibles au rythme des lignes harmonieuses"(" ("Le Salon de 1873", in: Gazette des Beaux-Arts, juin 1873, p.498). Elle ravira aussi les fervents adeptes de la Poétesse de Lesbos dont la magie des vers opère encore aujourd'hui.
*himation : châle porté dans l'Antiquité Géco-Romaine sur le Chiton (fine tunique); Cécryphale: bande de tissu retenant les cheveux prpore à la coiffure féminine de la Gréce Antique-* Klinai ou Klimé: Divan à dossier incurvé et piètement rectangulaire dont l'assise était surmontée d'une couche recouverte d'étoffes et oreillers;-*salpinx: trompette droite et évasée; Buccin ou Cornu: trmpette en forme d'un G; ;- épithalame: Poème, chant composé à l'occasion d'un mariage
** editée en bronze sous forme de statuettes par la Maison parisienne Susse en différentes grandeurs
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Matériaux: Bronze à patine brune.
Dimensions: H.:26 cm-L..: 32 cm;-Pr.:15 cm.
Ecole de Sculpture Française de la première moitié du XIXe siècle. Circa 1850-1860.
Trés Bel Etat. Patine d'origine