"E. Villanis (1858-1914)-prise De Corsaire. Bronze Orientaliste, Vers 1890."
Emmanuel
VILLANIS (Lille,1858-Paris, 1914)-"Prise de Corsaire". Belle
Epreuve en bronze à patines brun-médaille nuancées figurant campée en une
posture tout à la fois rebelle et retenue sur une petite éminence rocheuse,
fers aux poignets, une sensuelle jeune femme aux formes pulpeuses exaltées par
une ample étoffe sobrement bijoutée, sanglée "A L'Orientale"
d'une fibule, d'un ceinturon de cuir. Encadré d'une longue chevelure aux folets ondoiements auréolés d'un fin
bandeau, son visage aux traits menus, encore juvéniles laisse transparaître, en
ses yeux mi-clos intériorisant d'
évasifs et mélancoliques sentiments,
l'interrogatif émoi, le grave et
douloureux ressenti qui
traversent cette jeune femme désormais Captive d'impétueux Mercenaires de Mers.
Titrée et
signée en creux sur la façade et côté droit du tertre rocheux formant terrasse
- "PRISE DE CORSAIRE"/" Villanis"-, cette
sculpturale effigie féminine de veine
Orientaliste est soclée sur une base
rectangulaire moulurée portant à son revers
le cachet circulaire de la "Société des Bronzes de Paris",
principale éditrice avec la notoire Maison parisienne du Fondeur-Editeur de
Bronzes d'Art 'Eugène Blot (1857-1902) des oeuvres majeures modelées par
Emmanuel Villanis. Précédée de l'abrévation "A.P", cette Fonte ancienne est numérotée: "4653".
Sur l'avant
du socle est apposé un Cartouche dédicatoire ainsi libellé:
"A Charles Wattine */ Souvenir de ses Amis / 1898". Une
petite incursion dans la presse de l'époque ( L'Echo du Théâtre et de la
Musique, du 5 octobre 1912) nous a permis d'éclairer l'identité et
personnalité du destinaire de ce fort séduisant bronze à qui il fût offert en
1898 à titre de gratifiant hommage. Il s'agit vraissemblablement de Charles
Wattinne, Président de la Société Orphéonique de la Ville de Tourcoing
(Nord, Pas-de-Calais) dont " l'audace", le"zéle
éclairé et le dévouement" contribuèrent au" renom
artistique" d'une phalange
musicale qui ,lors des festivals
associés aux Expositions de grande envergure (Anvers, 1886; Paris, 1889.
Rouen, 1898; Milan, 1906) , sera distinguée de nombreux prix, gratifiée
de hautes distinctions dont en 1898 "trois Premiers Prix et la Coupe du
Président de La République".
Non
Datée.Circa 1890
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Modelée avec
suavité, cette envoûtante et ô combien lascive éffigie singulièrement voir exotiquement intitulée "Prise
de Corsaire" s'inscrit dans le petit corpus d'oeuvres -l'Otage à
la Colonne, à l'Arbre, L'Esclave, statues déclinées en
statuettes, bustes propices à une
édition en bronze- abordant sur un mode rêveur pour cet artiste-sculpteur
aguérri aux séductions et charmes de la Beauté féminine le thème de la
captivité auguré en 1890 par sa "Captive".
Présentée au
Salon des Artistes Français (statue, plâtre, n° 4600), aux côtés de la mélancolique "Jeune Fille de de Bou-Saâda " de Louis-'Ernest
Barrias (1841-1905), cette dernière
suscita l'intêret des Salonniers de l'époque, notamment du critique Paul Henry
lequel notait avec perspicacité : "A côté de celle-ci, on peut
placer, dans le même esprit, la jeune Mauresque en laquelle M.Villanis
personnifie L'Esclave.Assurément, les deux statues n'ont pas la même valeur,
mais celle de M.Villanis n'est pas sans mérite.Loin de là. Il a cherché
également à exprimer la soumission résignée, l'insouciance presque enfantine
des femmes orientales, et il y parvint presque complèment".
Plus enthousiaste, son confrère, Ernest Hoschedé soulignait: "M.
Villanis, artiste de grand talent a envoyé une Esclave étudiée avec une grande
science du modelé et un parti pris trés louable de simplicité. Peu de statuaire
poussent plus loin la conscience de l'exécution.C'est une oeuvre charmante dont
le marbre serait délicieux.Je suis étonné que le jury n 'ait pas distingué une
figure de cette valeur".
D'un "orientalisme"
de bon aloi, la "Prise de Corsaire" d'Emmanuel Villanis remporta les suffrages des amateurs d'art sensibles à
la qualité de son métier comme à
la délicatesse de son style rompu aux grâces et élégances de l'esthétique Art
Nouveau à laquelle tout au long de sa prolifique carrière artistique il
demeura le fidèle chantre. Aussi, l'oeil se complaît-il à parcourrir les
formes fluxueuses accentuées par un
sensuel contrapposto d'une belle ampleur chorégraphique du corps de
cette jeune Captive à la posture et expression tour à tour résignée et offerte, grave
et détachée. Nuancées, les patines du
bronze confèrent aura à cette oeuvre à juste titre emblématique d'un artiste-sculpteur
en notre siècle apprécié et reconnu en son domaine comme un des plus manifestes représentants de
l'Art Nouveau .
Littérature
liée: Berman, Harold, Bronzes, Sculptors and Founders,
1830-1930, Abago, Chicago, p.317, Ill. 1142;-Klellberg, Pierre, Les
Bronzes du XIXe siècle, Paris: Ed. de L'Amateur, 1989, pp. 641-6444; Launay, Pascal, Emmanuel Villanis: Un
sculpteur Art Nouveau, Catalogue raisonné, Ed;Thèbes, 2004
Dumas, Georges, Catalogue
Illustré du Salon , Paris: 1890;- Hoschédé, Ernest, Brelan de Salon,
Paris: 1890, p.168; -Henry, Paul, "Le Salon.IV La Sculpture",
in: Le Radical du 17 mai 1890
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Matériaux: Bronze à patine nuancée; métal
Signatures
et Marques: Titrée et Signée sur la terrasse en lettres
majuscules et cursives "PRISE DE CORSAIRE"/ Villanis"
Non daté .A l'arrière du socle, Cachet circulaire de la "Société
des Bronzes de Paris" suivi de la mention "A.P"
.Fonte numérotée: 46 536 ;Non Daté
Dimensions: H.: 87 cm;-L.: 30 cm;-Pr.: 25 cm.
Ecole de
Sculpture Française de la fin du XIXe-Début du XXe siècle.Epoque Art Nouveau.Vers
1890
Bel Etat de
patine. Manque le Chainon liant les fers enserrant les poignées de l'effigie
féminine.