Empereur Napoléon Bonaparte à Waterloo, 18 Juin 1815 D’après Charles De Steuben (1788-1856)

Costanzo ANGELINI.1760-1853.
Empereur Napoléon Bonaparte à Waterloo, 18 juin 1815 d’après Charles DE STEUBEN (1788-1856)
Circa 1850
Plume et encre noire, lavis gris sur traits de crayon noir
Signé et légendé : “Costanzo Angelini per il Cavaliere Gustavo Mellini Tenente Colonnello d’artiglieria fece”
68x 98 cm, avec cadre 105,5 x 76 cm 
Provenance
Collection Gustavo Mellini (c.1790-c.1888), d’après la légende de l’artiste
Galerie Maurizio Nobile Fine Art, Milan


Costanzo Angelini, chef de file des néo-classiques à Naples

Il nait à Santa Giusta dans les Abruzzes le 22 octobre 1760. Doté d'un talent précoce, il se rend à Rome avec son frère Lorenzo pour étudier les lettres avec un oncle. Mais très vite, il est attiré par les beaux-arts et fréquente l'école de Pietro Bianchi et Marco Caprinozzi pour la peinture. Ses dessins au crayon aux contours incisifs et précis dans un style néo-classique furent salués par David, Girodet et d'autres professeurs de l'Académie française dont les cours étaient alors également ouverts aux Italiens. La renommée du jeune Costanzo est telle qu’il se voit confier la tâche de réaliser 34 planches gravées et publiées par Volpato et Morghen dans leur ouvrage rassemblant les chefs-d'œuvre de la statuaire classique : Principi del disegno tratti dalle più eccellenti statue antiche (1786 Rome). En1790, il s’installe à Naples, il est alors chargé de dessiner les vases grecs de la collection de l'ambassadeur anglais Sir William Hamilton pour Ferdinand IV de Bourbon. Après avoir fréquenté pendant quelque temps l'Académie de San Carlo alle Mortelle et la manufacture de porcelaine de Capodimonte, il se rapproche du monde académique napolitain et enseigne le dessin à l’Académie Royale des beaux-arts de Naples avant d’en devenir le Directeur. En 1812, il est chargé de diriger l'atelier de gravure de l'Imprimerie Royale ; en 1813, il est nommé surintendant de la restauration des peintures anciennes du Musée Royal de Bourbon. À Naples, il est extrêmement célèbre pour ses portraits de l’aristocratie, à tel point qu'il était considéré comme l'un des meilleurs portraitistes italiens du début du XIXe siècle. Il peint Marie Caroline d’Autriche et l’Amiral Nelson, mais le changement de régime le rapproche du pouvoir bonapartiste. En 1808, Caroline Murat, dont il réalise également un portrait aujourd’hui conservé au Musée de San Martino, lui commande un tableau représentant son frère Joseph d’après une œuvre de Jean-Baptiste Wicar. C’est très certainement à la demande des Murat qu’il réalise la copie de la Bataille d’Aboukir d’après Antoine Jean Gros.

Napoléon à Waterloo, une image célèbre

Notre dessin copie une œuvre célèbre connue grâce aux nombreuses gravures qui l’ont reproduite. Il s’agit de Napoléon à Waterloo présenté au Salon de 1835 par Charles de Steuben, peintre spécialiste des sujets historiques et très apprécié de Louis-Philippe Ier pour qui il peint de nombreux tableaux pour le Musée de l’Histoire de France créé à Versailles. La critique salue chaleureusement ce tableau de Steuben qui illustre un passage de l’ouvrage de MM Gourgaud et Fleury de Chaboulon cité dans le livret du Salon : « À Waterloo au moment funeste où la fortune abandonna nos armes, n'espérant plus vaincre, l'Empereur poussa son cheval au milieu du dernier bataillon de réserve ,illustre et malheureux débris de la colonne de granit des champs de Marengo, lequel occupait le même terrain où, quelques heures plus tôt, il était victorieux. Cambronne, au milieu de ces braves, avait exprimé leur pensée, nul ne voulait tomber vivant dans les mains de l'ennemi. L'Empereur vint s'offrir à la mort ; tout tombait autour de lui, et les vieux grenadiers expirans, au lieu de songer à leurs blessures, ne s'occupaient que du péril qui le menaçait. Le maréchal Soult osa seul supplier l'Empereur de se retirer ; les généraux Drouot, Gourgaud et tout ce qui l'entourait, joignirent leurs instances aux siennes. Ils prirent enfin le cheval de l'Empereur par la bride et l'entraînèrent malgré lui ». Dépeignant ce moment fatidique de l’Histoire européenne, le tableau emporte également un grand succès auprès des artistes qui ne cesseront de le transposer en gravure. En France, les plus célèbres estampes reproduisant l’œuvre sont celles réalisées par Jean-Pierre-Marie Jazet et Colin. Notre dessin a peut-être été réalisé d’après l’une de ces deux œuvres. Aux dimensions très proches de la gravure deJazet conservé à la Malmaison, il témoigne de la minutie et de l’excellence du trait d’Angelini. La dédicace semble révéler quant à elle que le dessin n’était pas destiné à être reproduit, mais à être précieusement conservé par son destinataire.

Une œuvre pour un proche de Napoléon I

Angelini indique avoir réalisé l’œuvre pour Gustavo Mellini (c.1790-c.1888). Il s’agit d’un membre d’une illustre famille de l’Ile d’Elbe au service de Napoléon durant son exil. Son oncle Giacomo Mellini (1759-1842) participe à la campagne d’Italie avant d’accompagner l’Empereur à Elbe. Sa cousine Rosa devint liseuse de Letizia Bonaparte, qui la garde ensuite auprès d'elle jusqu'à sa mort en1836, Gustavo entre également au service de l’Empereur. Un document inédit, redécouvert dans les archives du Comte Agostino Fantoni, témoigne du lien qui l’unissait à l’Empereur exilé. Il s’agit d’un plan prévoyant de transformer la Villa San Martino en résidence impériale conçu par Giacomo et dessiné par Gustavo Mellini. Ce dernier deviendra par la suite lieutenant-colonel d’artillerie comme indiqué par la dédicace de l’artiste.

Littérature 

• André Michel, Histoire de l'artdepuis les premiers temps chrétiens jusqu'à nos jours. Tome VIII, 2èmepartie, A. Colin, 1926, Paris,
• Bindi Vicenzo,Artisti abruzzesi : pittori, scultori, architetti, maestri di musica,fonditori, cesellatori, figuli dagli antichi a 'moderni : notizie e documenti, Napoli, 1883
• Cioffi Rosanna,"Nuovi dipinti di Domenico Chelli: scenografo, pittore, architettofiorentino e massone", in "Napoli Nobilissima", s. VII, v. VI,fasc. III, settembre-dicembre 2020, pp. 51-65.
• FardellaPaola, Del collezionismo privato di dipinti a Napoli. 1799-1860,Tesi didottorato di ricerca in "Discipline storiche dell'Arte medioevale, modernae contemporanea. Storia e critica delle arti figurative nell'Italiameridionale", Università degli Studi di Napoli "Federico II",1999,
• Guardascione Ezekiele, Enciclopedia Italiana, Ottorino Uffreduzzi, 1929