Crayon, plume, encre et lavis, sur papier vergé, filigrané partiellement au Lys de Strasbourg
17,5 x 23 cm
PROVENANCE :
Feuille 26 de l'album de 101 dessins réalisés en Italie par Hubert Robert ;
(Probablement) Vendu dans le cadre de la vente d'atelier de l'artiste, Paris, le 5 avril 1809 ;
La comtesse de Béhague (1870-1939) [cette œuvre, feuillet 8] ;
Descendant dans la famille de Ganay ;
Succession du marquis de Ganay, Sotheby's, Monaco, le 1er décembre 1989, lot 34 (ill. p. 41) ; Collection particulière, France
EXPOSITIONS (l'album) :
Paris, Galerie Caileux, 1957, Hubert Robert - Louis Moreau : Exposition du Cent-Cinquantenaire De Leur Mort, cat. n° 1 ;
Washington, National Gallery of Art, 1987, Hubert Robert : Dessins et aquarelles, cat. n° 12
LITTÉRATURE (l'album) :
R.O. Parks, Piranèse, cat. d'exposition, Northampton, Mass., Smith College Museum of Art, 1961, p. 74 ;
J. Scott, Piranèse, Londres (1975), p. 175 et p. 311, note 9 ;
V. Carlson, Hubert Robert : Dessins et aquarelles (cat. d'exposition), Washington (1987), cat. n° 12
Robert aimait représenter ses collègues artistes en train de dessiner, et ils peuplent nombre de ses croquis et peintures, depuis ses années d'étudiant jusqu'à ses œuvres monumentales ultérieures, devenant presque un motif romantique dans ces dernières.
Des études comme celle-ci ont probablement inspiré ces dernières, bien que la scène soit presque certainement prise sur le vif : les pensionnaires de l'Académie de France à Rome étaient fortement encouragés à dessiner ce qu'ils voyaient dans la ville, un principe qui s'était manifesté dès les débuts de l'Académie à la fin du XVIIe siècle. Robert fut cependant l'un des premiers artistes à immortaliser le regard de ces jeunes artistes en train de dessiner, et ses dessins constituent des témoignages précieux de la vie artistique et des études à Rome à cette époque.
Cette feuille provient de l'un des rares carnets de croquis romains de Robert conservés, un album conservé complet jusqu'en 1989, et qui figurait très certainement dans la vente de l'atelier de l'artiste en 1809. Des dessins de ce même album sont aujourd'hui présents dans des collections du monde entier, notamment au Louvre, au Getty Museum, à la Morgan Library et à la National Gallery of Art de Washington. On pense que ce carnet a été utilisé pendant les dernières années de Robert à Rome, car deux dessins en sont datés, l'un de 1764 et l'autre de 1765. Plus de cinquante carnets de croquis étaient répertoriés lors de la vente de Robert en 1809, celui-ci étant désormais connu sous le nom d'album « De Ganay », du nom de ses précédents propriétaires, les marquis de Ganay.
Pour un artiste si intimement lié à Rome, il est peut-être surprenant d'apprendre que Robert n'y a passé que onze ans ; Cependant, durant cette période, il compila suffisamment de dessins de ce qu'il voyait et imaginait, et parfois d'une combinaison des deux, pour toute sa vie. Hubert Robert arriva à Rome fin novembre 1754 pour étudier à l'Académie française, où il serait pensionnaire. Cette période d'études prit fin en octobre 1762, mais les commandes et le soutien de ses amis lui permirent de rester à Rome trois années supplémentaires. Durant ses études et son travail à Rome, Robert se lia d'amitié avec son contemporain Charles-Joseph Natoire, avec qui il travaillait souvent et avec qui il collaborait occasionnellement, ainsi qu'avec les artistes italiens plus âgés Gian Paolo Panini et Giovanni Battista Piranesi, tous trois ayant largement inspiré et influencé l'artiste en herbe. La décennie qu'il passa à Rome fut l'une des périodes les plus importantes de la vie de Robert, et sa production prolifique de dessins témoigne de son désir d'assimiler le plus possible, d'affiner ce qui deviendrait un style personnel plus cohérent et établi, et de laisser libre cours à son imagination, à la plume, à l'encre, au lavis et à la craie. Une grande partie de l'œuvre de Robert de cette période a disparu, et les feuilles qui subsistent constituent donc à la fois des ressources précieuses pour comprendre le jeune Robert et des documents et documents historiques importants. Dans une analyse formelle des dessins à la plume et à l'encre de Robert datant de l'époque romaine, Victor Carlson a donné un aperçu général de cette partie particulière du corpus, et aurait presque pu lire notre feuille en écrivant :
« D'emblée, il est important de reconnaître que les dessins à la plume et au lavis romains de Robert varient considérablement en style, selon l'objectif de création d'une image… Les étudiants en dessins français du XVIIIe siècle sont probablement familiers avec les croquis rapides à la plume de Robert, dans lesquels il notait avec audace les vues ou les idées qui retenaient son attention. Généralement, ces annotations se trouvent sur des pages d'albums ou de carnets de croquis désassemblés [par exemple, la présente œuvre]… Nulle part ailleurs l'influence du dessin de Piranèse sur Robert n'est aussi évidente que dans des pages d'album comme celles-ci ; des traits de plume tracés à la hâte sur quelques larges traits de lavis peuvent évoquer un coin ensoleillé de Rome ou un caprice architectural.
(1) V. Carlson, « Hubert Robert à Rome : quelques dessins à la plume et au lavis », dans Master Drawings, vol. 39, n° 3 (automne 2001), p.289