- En très bon état.
- La passion de la modernité -
Le paysage urbain expressionniste devient un paysage d’apocalypse. Avec les carnages de la Première Guerre mondiale, le monde s’est déréglé. Des cheminées s’élèvent dans un ciel noir, d’où surgissent un squelette et un visage démoniaque. Les bâtiments forment une muraille impénétrable. En bas, une femme nue – écho aux nus allongés de la Renaissance – couvre ses yeux, terrifiée, flanquée d’un crâne. Une autre femme quitte la scène, son visage effacé : elle incarne la perte de l’humanité. Le centre est dominé par une tête inclinée, évoquant un prophète ou le Christ, prisonnier de l’architecture et tourné non vers le ciel mais vers un ciel de mort. Aucune rédemption n’est possible. Tappert crée ici une allégorie expressionniste de la chute, traduisant puissamment le sentiment existentiel de perte de repères.
Sur l’artiste
Après des études à l’Académie des Beaux-Arts de Karlsruhe (1900–1903) et un passage à l’école d’art réformatrice de Burg Saaleck, Georg Tappert s’installe à Berlin en 1905. Il y expose avec Paul Cassirer. De 1906 à 1908, il vit à la colonie d’artistes de Worpswede, où il fonde une école d’art. Son élève le plus remarquable est Wilhelm Morgner, tombé à la guerre, dont Tappert s’occupera du legs. À Worpswede, il rencontre Paula Modersohn-Becker, dont l’œuvre le marque profondément. De retour à Berlin, après avoir été rejeté par la Sécession berlinoise en 1910, il fonde avec Max Pechstein la Nouvelle Sécession (jusqu’en 1914), qui réunit aussi bien les artistes du Pont que ceux du Cavalier Bleu, tels que Franz Marc et Wassily Kandinsky. En 1911, avec Käthe Kollwitz, il organise la première exposition « sans jury » à Berlin. En 1918, il est cofondateur du Conseil des artistes et du groupe de novembre (Novembergruppe). En 1921, il est nommé professeur à l’école d’art d’État. En 1937, les nazis le révoquent et retirent de nombreux tableaux jugés « dégénérés ». Tappert se retire alors dans une forme d’exil intérieur, peignant surtout des paysages. Après 1945, il participe activement à la reconstruction de l’enseignement artistique, fusionnant son école avec celle dirigée par Karl Hofer.