Cette charmante et délicate peinture nous invite à prendre part dans les réjouissances des putti dans une clairière, au cœur d'un bosquet. La joie et l'insouciance règnent dans l'air, l'amusement est maître mot.
Au premier plan les putti dansent dans une ronde, les visages joyeux et charmants encadrés de leurs cheveux bouclés aux reflets dorés. Les fleurs cueillies auparavant ont été délaissées et se trouvent jetées par terre pendant que les enfants enjambent le panier renversé. Un des enfants brandit tel un trophée une branche de rosier, tandis que l'autre essaye de se relever après une chute provoquée sans doute par la cadence frénétique de la danse. Le chérubin supervise dans l'air la scène et s’apprête à répandre sur ses compagnons les fleurs de ses mains. Le rythme est donné par les apprentis musiciens au seconds plan, un putto s'efforce à pincer le luth, tandis que les deux autres puttos apprivoisent la viole de gambe. Le violon et la lyre sont abandonnés et mis de cotés.
Un savant éclairage illumine la scène et contraste avec la pénombre du bosquet. A gauche une ouverture lumineuse apporte de la profondeur a la composition.
Le traitement méticuleux de la végétation associée à une palette recherchée mêlant toutes les teintes du vert, jaune et ocre afin de créer les feuillages, branches et troncs de cette foret fournissent un magnifique écrin à nos putti enveloppés d'une lumière dorée. Leurs corps rondelés aux membres potelés sont délicatement peints, rehaussés de touches de lumière éclatante et soulignés d'ombres légèrement rosés. Le peintre s'applique avec tant de soin et précision à exécuter les nombreux détails de leurs petits pieds aux orteils bien dessinés, les enroulements de cheveux.
Grace à ses coups de pinceaux délicats et légers notre artiste donne vie à sa composition et invite le spectateur à partager un moment de gaieté et de tendresse, à s’évader quelques instants dans un monde magique ou le temps s’arrête et où prime l'innocence et nous sommes tous enfants.
Notre composition fidèle aux préceptes du maniérisme et à l'admiration de la nature est toute de même énigmatique du point de vue de sujet représenté. Comment expliquer la volonté du peintre à réaliser une composition ou les putti, les angelots, les amours sont les figures principales d'un tableau et se trouvent au cœur de l'oeuvre. Dans la peinture de cette époque les petits enfants tels les personnages secondaires, accompagnent les héros de scènes bibliques ou mythologiques (les petits angelots autour de la Sainte Famille ou les petits amours accompagnant les dieux et ou les déesses, les infatigables compagnons de Bacchus enfant). Y-a-t il un message caché et moralisateur dans cette oeuvre ou sommes nous seulement des témoins d'une quête de l'insouciance de l'artiste?? Notre tableau est mis en valeur dans un magnifique cadre français en bois sculpté et dore d'époque XVIIeme aux coins fleuris. Huile sur panneau de chêne, dimensions: h. 31,5 cm, l. 38,5 cm; encadré: h. 45,5 cm, l. 53,5 cm.
Très bel état de conservation.
Epoque XVIIe siècle Quelques versions similaires à notre tableau sont connues, dont sans doute la première exécutée vers 1605 par Hans Rottenhammer, conservée à Alte Pinakothek, Munich ( n° inv. 753) en collaboration avec Jan Brueghel l'Ancien. La deuxième également par Rottenhammer est passée en vente chez Christie's Londres, 24 avril 2009. Une troisième du même peintre mais d'un format différent est au Musée de Valette, Malte. En comparant ses versions avec la notre, nous serions tentés d'attribuer notre tableau à ce prestigieux maître allemand, cependant, en approfondissant notre recherche plusieurs éléments importants nous permettent d'attribuer la peinture à un maître anversois: Hendrick Van Balen.
Les éléments justifiant cette attribution sont les suivants: les trois versions de Rottenhammer sont exécutées sur cuivre, tandis que la notre est sur panneau de chêne ce qui permet d'attester une provenance nordique, il existe aussi des différences notables de palettes utilisées: la palette aux couleurs acidulées et plutôt froides de Rottenhammer se transforme dans notre oeuvre en couleurs chaudes comportant du rouge, ocre et jaune typiques des œuvres de H. Van Balen. On retrouve également dans les putti sa manière d’exécuter les figures aux formes plus rondelées et moins élancées et il utilise plutôt des couleurs pastels pour les réaliser contrairement à Hans Rottenhammer qui rehausse les chaires avec le rose vif. Les contours de nos putti semblent aussi plus vaporeux et moins dessinés. L'ensemble de ses observations justifie l'attribution à Hendrick Van Balen, dont les nombreux œuvres comportent les figures d'enfants similaires aux notres.
Hendrick Van Balen s'est beaucoup inspiré de Rottenhammer lors de son sejour à Venise et Rome, ou le peintre allemand travaillait. Van Balen était également témoin d'une collaboration de Rottenhammer avec Jan Brueghel à Anvers où les tableaux étaient envoyés afin que le maître de la végétation Brughel puisse animer et embellir le paysage derrière les figures de Rottenhammer.
Hendrick Van Balen Peintre flamand (Anvers 1575 – id. 1632).
Originaire d'Anvers, Hendrick van Balen aurait commencé son apprentissage auprès de Martin de Vos avant de partir pour l'Italie, où il s'arrêta à Rome et à Venise où il fréquenta notamment Hans Rottenhammer qui l'influenca durablement. A son retour, il ouvrit un atelier qui fut, à côté de celui de Rubens, l'un des plus prospères d'Anvers. Spécialisé dans les tableaux de cabinet aux sujets allégoriques savants, il a souvent recours à d'autres mains pour peindre les paysages de ses oeuvres ainsi il s'entoure des pinceaux raffinés de Brueghel de Velours, de Jan Brueghel le Jeune mais aussi de Joos de Momper et de Gaspar de Wit. Au sein de cet atelier également voué à l'art de la gravure, va se développer un répertoire de figures que l'on retrouve habilement déclinées au sein de leur production. Hendrick Van BalenHans Rottenhammer (Munich 1564 - id. 1625) est un peintre allemand.Élève de Hans Donauer à Munich, il s'établit à Venise (1589), puis à Rome (jusque vers 1595), à Venise (1596-1606) et à Augsbourg.Il collabore avec Paul Bril pendant son séjour à Rome et s'inspire du Tintoret et de Véronèse lors de son dernier séjour à Venise.Il tient une place spécifique dans l'histoire de l'art allemand, en sa façon de traduire l'essence de la haute renaissance vénitienne par de petits formats. Ses peintures représentant des scènes mythologiques ou religieuses, imprégnées de « maniérisme », sont hautement appréciées jusqu'au XVIIIe siècle.Ses œuvres figurent dans de nombreux musées d'Europe.