Peintre Libanais
Grande Aquarelle de format 50cm sur 70cm signée et datée
10 décembre 2021 Mohammad Kaddoura, l’éternel ami, amant et poète de Aïn el-Mreissé Hommage au maître du pinceau qui a disparu dans le silence, comme celui qui habitait les images de ses gouaches, ses lavis et ses dessins à l’eau... Mohammad Kaddoura, l’éternel ami, amant et poète de Aïn el-Mreissé Les aquarelles de Mohammad Kaddoura, journal intime et chroniques douces-amères de Aïn el-Mreissé. À 80 ans, il est parti sur la pointe des pieds, comme il a vécu. Peintre d’une discrétion absolue, Mohammad Kaddoura est resté tout au long de sa carrière loin des mondanités. Dans ses aquarelles, il ne forçait jamais les traits ou les couleurs. Cette parcimonie du crayon ou des tonalités, afin de donner toutes les priorités à la lumière et au blanc du Canson, était d’une ravageuse beauté. Svelte et filiforme, Mohammad Kaddoura illustrait l’élégance austère d’un gentleman, conservant au fil des ans sa barbichette devenue poivre et sel au passage du temps. Depuis son appartement à Aïn el-Mreissé aux grandes baies vitrées, la mer lui offrait un trésor de reflets entre le camaïeu du bleu des beaux jours et les gris des jours de tempête. Né en 1941, sa disposition pour l’aquarelle fut notoire dès sa prime enfance, et c’est à l’Institut des beaux-arts de Rome qu’il peaufine son art. De Aïn el-Mreissé, lieu d’élection et de prédilection dont il connaissait chaque coin et recoin, il a accompagné, avec tristesse et un serrement au cœur, l’invasion des grandes tours échevelées aux dents de verre et d’acier, ces mégamonolithes qui ont pris d’assaut la côte et remplacé les vieilles demeures à l’architecture fine, mélange de style florentino-vénitien et d’esprit du terroir. Les tuiles rouges, les fenêtres en arcade, les mandalouns, les portes en bois joyeusement peintes, tout cela disparaissait graduellement sous l’impulsion massive des gloutons promoteurs immobiliers adeptes du béton sauvage. Restaient la mer, ses vagues, ses frêles embarcations pour des touristes en quête de découverte ou des pêcheurs qui sortent à l’aube de la rade pour jeter leurs filets. En ces temps-là, c’est-à-dire avant la guerre fratricide et ses horreurs, la pollution était supportable et la faune aquatique pas encore en danger imminent. On flirtait encore avec l’espoir. Tout cela, Mohammad Kaddoura l’a raconté avec ses aquarelles qui apparaissent comme le journal intime et les chroniques douces-amères de Aïn el-Mreissé. De l’Italie (Rome, Milan) aux pays arabes (Koweït, Rabat, Riyad) en passant par Paris et Washington, ses expositions (solo et collectives) ont toutes été plébiscitées et acclamées par le public, tandis que la presse le sacrait à l’unanimité « peintre de la lumière ». Ses activités se sont étendues sur plus de deux décennies et son triomphe a été son premier hommage public à cette région de Ras Beyrouth qui a eu lieu au « Centre d’art » de Brigitte Schéhadé. Une galerie justement située à Aïn el-Mreissé et qui était devenue à la fin des années 70 le point de rencontre et de ralliement d’éminents artistes. Elle accueillait en effet le gratin de la peinture de cette époque, à savoir Max Ernst, Miró, André Masson, Mathieu, Chafic Abboud, Juliana Séraphim… Comme pour Olga Limansky, entrée dans les annales de la peinture libanaise avec cette toile représentant des façades de masures branlantes abritant du linge qui sèche au soleil, symboles d’une beauté et d’un parfum de la simplicité de vivre au Liban, Mohammad Kaddoura est entré dans l’inconscient collectif grâce à son œuvre nuancée, chargée d’émotion et de sensibilité. Rien que pour avoir peint avec tant de verve, de chaleur, de sentiment et de virtuosité ce poumon de la côte beyrouthine, alliant beauté et halo de quiétude, il mérite une page à part dans l’histoire de la peinture libanaise contemporaine.