À la croisée de deux univers, l’exposition Collections japonaises du château de Fontainebleau. Art et diplomatie, est le résultat de découvertes inédites faites par une équipe de chercheurs et conservateurs français et japonais.
Elle présentera au public des cadeaux diplomatiques offerts par l’avant-dernier Shôgun Iemochi à Napoléon III lors de deux ambassades japonaises en 1862 et 1864. Un temps exposé et admiré, cet ensemble d’œuvres d’art a par la suite été rangé dans les réserves du château et progressivement oublié. L’exposition donne ainsi vie à un ensemble d’œuvres au statut particulier, situées à une période de transition où le Japon fait ses premiers pas sur la scène internationale.
Les ambassades itinérantes de 1862 et 1864 avaient pour ambition de sonder les intentions des gouvernements européens et de tenter de renégocier les traités dits inégaux qui venaient d’être signés suite à l’ouverture forcée du Japon par le Commodore Perry en 1854. Le Japon, par son inscription dans le monde sinisé, avait une grande expérience de l’art d’offrir des cadeaux. C’est donc en s’appuyant sur cette tradition qu’il envoie en France des peintures, des objets en laque et dans d’autres matières.
Les archives diplomatiques japonaises nous renseignent sur le soin qui a présidé au choix des œuvres et sur le processus de fabrication – ce sont les peintres officiels du shogunat qui ont réalisé les kakemono et le paravent – et comment elles ont parfois été adaptées au goût occidental. Ces présents
doivent avant tout permettre au Japon de manifester son prestige sur la scène internationale. Mais leur présence au château de Fontainebleau s’inscrit aussi dans la grande tradition du goût des élites européennes pour l’art de l’Asie orientale, à la veille de l’éclosion du japonisme.
Cette exposition est le résultat d’une collaboration étroite entre les chercheurs japonais, la direction du patrimoine et des collections et Estelle Bauer qui a porté le commissariat scientifique. Grâce à cette recherche menée conjointement, les artistes et artisans qui ont fabriqué ces pièces ont pu être identifiés et les motifs iconographiques ainsi que les techniques utilisées ont été étudiées de près.
Un inventaire précieux permettant de statuer sur la provenance diplomatique des pièces a aussi été découvert par les chercheurs japonais. Cette collaboration a également permis d’établir un constat d’état qui a mené à une première campagne de restauration.
L’exposition se divise en deux parties.
La première est consacrée aux peintures. Parmi les cadeaux offerts, figurent 10 kakémonos (rouleaux verticaux). Très éloignés des préoccupations des membres de la délégation, ils sont ancrés dans un univers qui mêle, consciemment ou non, plusieurs imaginaires pouvant être regroupés, avec toutes les précautions qui s’imposent, sous la rubrique d’un Japon héritier de la cour de Kyôto, ou bien sous celle d’un Japon héritier de la Chine impériale. Les auteurs des peintures servent le gouvernement shogunal. Leur principale aptitude est la polyvalence : ils sont à même de répondre à toutes sortes de commandes et maîtrisent ainsi tous les sujets et tous les styles, peinture à l’encre monochrome comme celle aux couleurs chatoyantes.
La deuxième partie de l’exposition présente des objets et des meubles, pour l’essentiel en laque. Fabriqués eux aussi dans les ateliers shogunaux, mais pour être expédiés en France après le retour de l’ambassade de 1862, ils témoignent également de l’étendue des savoir-faire et de la culture des artisans officiels.
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Exposition jusqu’au 19 septembre 2021