La peinture sous verre est connue en Occident depuis l’antiquité, on en a trouvé des exemples dans les civilisations assyrienne et phénicienne. Qualifiée d’« art savant », c’est au cours de la Renaissance que cette forme d’art atteignit son apogée en ce que les compositions devinrent très élaborées, les coloris harmonieux, la virtuosité de la technique étourdissante.
La peinture sous verre est une technique unique car l’œuvre est réalisée sur le dos du verre. Alors que sur une toile on esquisse la composition à grands traits pour ensuite exécuter les aplats de couleur pour terminer graduellement par les détails, en peinture sur verre inversé on procède à l’inverse. Au contraire de la technique normale, d’exécuter les détails (le nez, les yeux, les fleurs) avant le fond (le visage, le paysage), le spectateur devant regarder l’œuvre terminée sur le côté non peint de la plaque de verre.
L‘artiste peintre sur verre commence par les finesses de l’œuvre pour terminer avec les fonds. Ainsi jusqu’au moindre détail, le peintre doit imaginer dès le départ la version définitive de l’image à réaliser sachant bien qu’il devra aussi composer avec un « effet miroir » lors de l’exécution de l’image puisque ce qui est peint à l’envers à droite se trouve à l’endroit à gauche.
Largement pratiquée en Europe, de l’Espagne à la Pologne, et jusqu’en Asie, la peinture sous verre est liée à l’industrie du verre et à sa diffusion. Introduite à Venise au Moyen Age, elle atteint sa pleine maturité dans la deuxième moitié du XVIe siècle grâce à l’influence des verriers byzantins installés sur l’ile de murano depuis le XIIIe siècle. Venise devient alors un des centres de production de cet art savant qui tend à devenir dès le XVIe-XVIIe siècle un art populaire.
On attribue aux ateliers vénitiens deux groupes de peintures sous verre : l’un à ciels bleu profond et personnages au premier plan sur fond de paysages lombards, l’autre utilisant des modelés en fines hachures qui évoquent la technique de la gravure. Les sujets religieux et tirés du Nouveau Testament sont inspirés d’œuvres vénitiennes ou lombardes, puis de l’école de Caravage ; bien que faites en série et destinées à une clientèle populaire, ces peintures habiles, à la palette subtile rehaussée d’or et au dessin savant, reflètent l’esprit des modèles qu’elles copient.
Des éléments de décors d’inspiration religieuse et mythologique, destinés à orner les tiroirs et les portes des cabinets, sont fabriqués parallèlement. Dès les XIVème et XVème siècle, des verriers de Murano émigrent vers d’autres villes d’Italie, en Autriche, en Allemagne, en France, dans les Pays-Bas. Ils apportent leur technique, mais trouvent sur place des thèmes nouveaux dans les œuvres de Dürer, des peintres de l’école de Fontainebleau, des paysagistes flamands.
En France au XVIIème et XVIIIème siècle, les ateliers parisiens ou proches de la capitales se sont inspirer de la grande peinture pour ornées des boîtes précieuses de fixés sous verre dont la facture soignée, le raffinement et les thèmes tirent leurs sources des toiles de Largillière, Lancret, Boucher, Chardin, Greuze, Hubert Robert, Vernet, Boilly.
Au fur et à mesure de son extension en pays germaniques et en Europe centrale ( Autriche, Bavière, Bohême, Silésie, Forêt-Noire, Pologne, pays slaves ) jusque dans les Balkans, durant les XVIIIème et XIXème siècles, ce qui était encore un « art de ville » et qui était réservé à une élite d’artistes, se pratique désormais dans des petits ateliers familiaux et devient l’une des expressions les plus vigoureuses de l’art populaire.
D‘un caractère tout différent sont les fixés sous verre d’Europe centrale, souvenirs et ex-voto que les ouvriers des verreries du nord de la Bohême fabriquaient en série, pour compléter leurs salaires, à l’intention des pèlerins qui se rendaient dans les sanctuaires célèbres d’Autriche, de Moravie, de Pologne. Venue d’Italie par le Tyrol et la Bavière v. 1770, la technique y reste florissante jusque v. 1880.
Au contraire des peintures sous verre italiennes, les fixés d’Europe centrale s’inspirent des anciennes images de pèlerinages, reproduisent les saints familiers et locaux, les héros populaires, les danses traditionnelles. C’est un art régional, folklorique, séduisant par son charme populaire et la vivacité de ses couleurs, et qui s’implante en Alsace dans la seconde moitié du XVIIIème siècle. Aux sujets religieux s’ajoutent alors des sujets profanes : portraits de personnages illustres, scènes ou personnages allégoriques.
Bien vite la production en série se propagea au sein de manufactures qui voisinent les verreries : un commerce parfaitement organisé s’instaura et perdura jusqu’à la fin du XIXème.
Le XIXe siècle marque l’apogée de cette technique picturale mais aussi le début de son déclin avec l’invention et la diffusion de la chromolithographie.