Flower Power

Le musée des impressionnismes Giverny propose, en collaboration avec la Kunsthalle München, et avec les soutiens exceptionnels du musée d’Orsay et du Centre Pompidou, une exploration inédite du pouvoir des fleurs, de l’Antiquité à nos jours.

Inaugurée en février 2023 à Munich, l’exposition Flowers Forever, devient Flower Power à Giverny. Enrichie d’une section sur l’impressionnisme, l’exposition donnera la part belle aux grands maitres tels que Bazille, Manet, Caillebotte ou encore Cézanne.

Quelle est la symbolique de la fleur au fil des siècles ? Au-delà de l’esthétique et de la poésie, quels messages les artistes ont-ils cherché à faire passer grâce au motif floral ?

Frédéric Bazille, Fleurs, 1868 © Ville de Grenoble / Musée de Grenoble – J. L. Lacroix

Flower Power propose d’élargir notre regard grâce à des sections thématiques consacrées à l’histoire et à la mythologie, aux relations entre sciences et Art, aux religions, mais aussi à la politique et à l’économie.

L’exposition est le premier projet à présenter une vision interdisciplinaire, interculturelle et internationale de l’histoire des fleurs. Elle rassemblera une centaine d’œuvres parmi lesquelles des chefs d’œuvre de peintures, des sculptures, des photographies, des estampes, des livres, des objets d’art, des robes de créateurs, des œuvres contemporaines et des installations spécialement conçues pour les galeries du musée.

Une fleur aux nombreux symboles

Un symbole historique

Dès l’Antiquité, Ovide réunit dans ses Métamorphoses près de 230 mythes et légendes. Dans cette épopée figurent, parmi d’autres, trois personnages : Narcisse, Clytie et Hyacinthe, tous trois devenus une espèce florale après leur mort. L’exposition Flower Power relate ces destins à travers des sculptures et des peintures. L’art nous rappelle alors la principale force des fleurs : celle de disparaître et de renaître chaque année en suivant les cycles de la nature, faisant réapparaître la beauté à chaque printemps.

Le motif floral inspire aussi les peintres victoriens, qu’il s’agisse de représentation de l’Antiquité comme dans Les Roses d’Héliogabale de Lawrence Alma-Tadema ou de la retranscription des récits médiévaux. Le peintre Edward Burne-Jones consacre ainsi plusieurs œuvres à l’un des textes fondateurs de la littérature française : Le Roman de la Rose, écrit au XIIIe siècle.

Manufacture de Sèvres, Jardinière et bouquet , XVIII e siècle © RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d’Ecouen) / René-Gabriel Ojeda

La rose, que l’on retrouve dans de nombreuses œuvres, devient dans ce texte un symbole d’amour et de féminité. Elle renoue avec ses premières significations symboliques, puisqu’elle est, depuis l’Antiquité, l’un des attributs de Vénus, la déesse de l’amour et de la beauté. Au XIXe siècle, alors que les impressionnistes se passionnent pour la vie moderne, beaucoup d’artistes continuent ainsi d’être inspirés par les textes anciens et la symbolique des fleurs. C’est à cette même période que Charles Baudelaire écrit Les Fleurs du Mal, dont certains exemplaires présentés dans l’exposition Flower Power sont illustrés par Odilon Redon et Auguste Rodin.

Delacroix Eugène, Bouquet champêtre, vers 1850 ©RMN-Grand Palais (PBA, Lille) / René-Gabriel Ojeda

Le rôle des fleurs dans les religions

Dès l’Égypte antique, les productions représentant les fleurs sont nombreuses. On retrouve ainsi les fleurs de papyrus et de lotus qui poussent naturellement sur les rives du Nil, le fleuve sacré. Le lotus est également présent dans le bouddhisme, où il traduit le potentiel de l’homme à élever son esprit à travers les pratiques de la religion et de la méditation – un thème repris notamment par l’artiste contemporain Ru Xiao Fan dans son œuvre Ode à la méditation, Jingdezhen.

Les motifs floraux, symboles de renaissance, occupent en effet une place centrale dans la majorité des religions et évoquent le paradis dans les croyances chrétiennes ou islamiques. Des panneaux de céramique proposant une grande variété de motifs floraux ornent ainsi les palais et les mosquées de l’empire Ottoman, tandis que la rose est souvent représentée dans la religion chrétienne. Symbole marial, elle annonce la passion du Christ et rappelle ainsi les thèmes de la mort et de la résurrection.

Ann Carrington, Delft Snowball, s.d © Ann Carrington – ADAGP, Paris, 2023

L’utilisation de la fleur dans le contexte politique

Malgré sa fragilité, la fleur peut pourtant constituer un symbole de résistance ; nourricière et bénéfique, elle peut parfois se révéler toxique.

Le mouvement Flower Power, le pouvoir des fleurs, met à l’honneur les couleurs vibrantes et l’énergie contestataire caractéristiques des années 1960-1970, période emblématique qui prônait la non-violence.

Certains artistes contemporains, comme l’artiste chinois Ai Weiwei, utilisent la fleur comme un outil de résistance silencieuse. Flower Power expose une réplique en porcelaine du panier de vélo dans lequel l’artiste a placé chaque jour, pendant un an, un bouquet de fleurs fraîches. Privé de sa liberté d’expression et de circulation, il a utilisé le langage des fleurs pour partager avec le monde une protestation pacifique.

La fleur chez les impressionnistes

Impossible d’imaginer une exposition sur les fleurs à Giverny sans convier les impressionnistes. Soucieux de représenter la nature dans ses mouvements et ses variations, les grands maîtres ont essentiellement représenté les fleurs qu’ils avaient sous les yeux. Pour ouvrir la section dédiée aux impressionnistes, Flower Power met en avant deux peintres : Eugène Boudin et Eugène Delacroix. Précurseurs du mouvement, ils sont admirés par toute une génération de peintres et ouvrent la voie aux natures mortes de Frédéric Bazille, Henri Fantin-Latour ou encore Édouard Manet.

La collection du musée est également à l’honneur dans Flower Power avec le Parterre de marguerites de Gustave Caillebotte. Il s’agit là d’un l’exemple unique de déclinaison de fleurs à la manière d’un papier peint ou d’un paravent japonais.

L’exposition prolonge son exploration dans le XXe siècle à travers la photographie ou encore le modernisme américain. L’une des pionnières du mouvement, Georgia O’Keeffe, choisit le motif de la fleur qu’elle représente monumentale et spectaculaire.

Le motif floral se décline au gré des nouvelles visions sur l’art et le monde et au gré des mouvements picturaux qui se succèdent. Déformée, abstraite, la représentation de la fleur a dépassé l’interprétation symbolique et l’étude botanique pour acquérir une nouvelle liberté plastique et iconographique.

Flower Power
Musée des Impressionnismes Giverny
99 rue Claude Monet, 27620 Giverny
jusqu’au  au 8 janvier 2024

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