Impressions du Soleil Levant

Exposition de clôture du 150ème anniversaire des relations Alsace-Japon, dont le textile fut l’un des premiers domaines d’échange au  Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse.

Dès 1864, les manufactures alsaciennes exportent vers le Soleil Levant des étoffes de mousseline de laine. Le Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse se propose à cette occasion de retracer cette fresque historique au travers d’une exposition jusqu’au 11 octobre 2015,  consacrée à l’influence japonaise sur le textile alsacien.

Echantillon pour l’ameublement, Alsace vers 1870,Impression au rouleau et à la planche sur toile de coton (c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse
Echantillon pour l’ameublement, Alsace
vers 1870,Impression au rouleau et à la planche sur toile de coton
(c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse

En 1854, sous la menace américaine, le Japon s’ouvre à l’Occident. Des relations économiques et culturelles se mettent alors en place avec les grandes puissances. Ainsi, le 9 octobre 1858, à Edo, un traité d’amitié et de commerce est signé entre la France et le Japon. Sur le plan économique, l’industrie alscienne s’intéresse rapidement à ce nouveau marché qu’elle tente de conquérir, notamment en adaptant l’impression sur laine au goût nippon. La production de châles à motif cachemire a en effet permis aux manufactures alsaciennes d’atteindre sur ce support une qualité et un savoir faire équivalent à celui du coton ayant bâti leur réputation.

Echantillon à motif de pins parasol Alsace, Thann, manufacture Scheurer-Rott & Fils, vers 1890 Impression rouleau sur toile de coton (c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse
Echantillon à motif de pins parasol
Alsace, Thann, manufacture Scheurer-Rott & Fils, vers 1890
Impression rouleau sur toile de coton
(c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse

Le Japon, ne dispose alors d’aucun élevage de moutons et le climat nécessite des vêtements chauds en hiver. En 1863, la manufacture Thierry-Mieg & Cie est la première à réaliser des laines imprimées destinées à ce pays. Elle sélectionne pour cette nouvelle clientèle des motifs ornementaux japonais imprimés en blanc sur des fonds rouges ou violets. Elle imite par le bais de l’impression à la planche une technique traditionnelle japonaise de teinture à la réserve par ligature : le Shibori. La première cargaison arrive au japon en 1864. Ces étoffes servent principalement à la fabrication de kimonos. Si peu d’entre eux ont été conservés, on peut les identifier reproduits sur les estampes japonaises.

Certaines laines sont également utilisées pour la fabrication de sous-vêtements. Sous l’impulsion de Thierry-Mieg Cie, d’autres manufactures alsaciennes produisent bientôt pour ce nouveau marché. Les genres deviennent alors plus élaborés, à l’exemple de la manufacture Heilmann Frères de Mulhouse qui, en 1866, imprime sur laine des des couleurs ombrées d’une grande difficulté technique. Semblablement, la manufacture Scheurer & Cie de Thann imprime au rouleau des étoffes riches sur le même support. Les riches archives du Musée conservent les dessins et les étoffes originaux de cette production spécifique.

Empreinte pour impression sur mousseline-laine destinées au Japon Alsace, Mulhouse, Manufacture Wilhelm Frey, vers 1875-1879 Impression à la planche sur papier
Empreinte pour impression sur mousseline-laine destinées au Japon
Alsace, Mulhouse, Manufacture Wilhelm Frey, vers 1875-1879
Impression à la planche sur papier

 

Parallèlement, en Europe, le japon influence tout à la fois les arts majeurs et décoratifs et le textile n’échappe pas à cette mode du japonisme. Les étoffes se couvrent de motifs naturalistes ou de personnages en kimono ; l’art japonais ouvre aux dessinateurs un nouvel univers peuplé d’animaux, d’insectes, d’oiseaux présentés dans leur environnement naturel. Les soieries japonaises présentées lors d’expositions telles que celle de la chambre de commerce de Mulhouse, constituent également une source d’inspiration pour les dessinateurs textiles. Certains collectionnent les pochoirs et les estampes qui servent de modèles à leurs production ou s’abonnent à la célèbre revue « Le Japon Artistique » qui explore l’art japonais dans tous les domaines.

Echantillon pour l’ameublement, Alsace,1889 Impression à la planche sur toile de coton
Echantillon pour l’ameublement, Alsace,1889
Impression à la planche sur toile de coton

A l’instar de nombreux collectionneurs alsaciens, La Société Industrielle de Mulhouse acquiert de nombreux objets japonisants ou d’origine japonaise. D’exceptionnels vases signés Emile Gallé côtoient ainsi des poteries japonaises ou des armures de Samouraï, dans les collections alsaciennes. En collaboration avec le CEEJA (Centre Européen d’Etudes Japonaises d’Alsace), et avec le soutien du Consulat Général du Japon à Strasbourg, de Mulhouse Alsace-Agglomération, du Département du Haut-Rhin et de la Région Alsace, l’exposition « Impressions du Soleil Levant » constitue une occasion unique de redonner vie à ces différents ensembles.

Kimono pour femme, Japon, Kyoto, Maison Ohara, 1980 Impression au pochoir sur soie. (c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse
Kimono pour femme, Japon, Kyoto, Maison Ohara, 1980
Impression au pochoir sur soie.
(c) Musée de l’Impression sur Etoffes de Mulhouse

Sous l’ère Meiji (1868-1912), le textile japonais s’industrialise et se développe pour se positionner dès lors comme concurrent des manufactures alsaciennes. En 1901, La manufacture Steiner de Ribeauvillé en fait les frais lors d’un appel d’offre d’un grand magasin parisien pour l’impression de fanions puisqu’un industriel japonais remporte la marché. Toutefois, une influence européenne plus subtile se fait toujours sentir dans la production de tissus d’habillement. Les cotonnades se couvrent de motifs minimalistes, le plus souvent monochromes ou bicolores, contribuant progressivement à l’occidentalisation du vêtement au Japon où elles sont exportées.

L’influence du Japon sur le vocabulaire décoratif textile demeure encore aujourd’hui très présent et l’Alsace et le Japon s’attachent à faire perdurer leurs relations commerciales et culturelles. Célébration de ces indéfectibles liens franco-japonais, l’exposition « Impressions du Soleil Levant » met en lumière un échange fructueux et un dialogue riche entre ces deux cultures. Véritable symbole de cet enrichissement partagé, la Maison LEONARD Paris honore le Musée de sa présence par une présentation inédite d’un ensemble de créations d’inspiration japonisante.

En savoir plus:

http://www.musee-impression.com/

Et ici pour les amateurs de thé vert japonais.

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