Dans le cadre de l’année franco-russe du tourisme culturel initiée en 2016, le Centre des monuments nationaux a signé un accord de jumelage culturel entre quatre monuments français et quatre monuments russes à des fins de connaissance scientifique et de développement du tourisme culturel.
Le château de Champs-sur-Marne, situé près de Paris et le château de Kouskovo à Moscou ont ainsi été jumelés. Datant tous deux du XVIIIème siècle, ils s’inscrivent au cœur d’un grand parc aménagé à la française, se situent respectivement dans le Grand Paris et à Moscou et ont appartenu à des personnages illustres.
De ce jumelage naissent de belles collaborations. Ainsi l’exposition L’Histoire en costumes, l’élégance au XVIIIème siècle, originellement présentée au château de Champs-sur-Marne, a été proposée au château de Kouskovo cette année. En retour, le monument français expose, Kouskovo dresse la table à Champs – Un service impérial d’exception, présentant un service de table ayant appartenu à la tsarine Catherine II et provenant de la collection du château russe, également musée national de la céramique.
L’exposition
L’exposition Kouskovo dresse la table à Champs – un service impérial d’exception met en lumière 126 pièces de porcelaine et de verrerie du « Service de Chaque Jour » (Вседневного), destiné à l’usage personnel de Catherine II. Ce service de table, créé à la manufacture Impériale de porcelaine de Saint Pétersbourg entre 1770 et 1790, a ensuite fait l’objet de compléments jusqu’aux années 1830. A l’origine, il comptait de très nombreuses pièces. Il a au fil du temps été divisé, certains éléments entrant dans les collections de Kouskovo par le biais de la collection nationalisée d’Alexei Morozov, d’autres rejoignant les collections du musée de l’Ermitage à Saint Pétersbourg.
Utilisé lors des repas quotidiens de l’impératrice mais aussi à l’occasion de fêtes, cet ensemble de vaisselle était appelé « ordinaire » puisqu’il était fabriqué sur ordre du Cabinet de la cour pour les palais impériaux et non sur ordre personnel de l’Impératrice. Il comprend des objets d’une grande variété de formes et d’utilisations, tous ornés de fleurs peintes, et est complété par des figurines en porcelaine réalisées à la manufacture Gardner dans les années 1770-1780.
Sur les conseils avisés de Jacqueline Queneau, écrivain et experte en arts de la table, ce service exceptionnel est présenté dans la grande salle à manger du château de Champs. La table se pare alors de toutes ces pièces délicates, accompagnées de reproductions de véritables mets servis à la cour de Russie venant parapher le raffinement de la présentation.
Avec ces parfaites figurations spécialement conçues par Anne Buchet, fondatrice de Leurres exquis, l’exposition Kouskovo dresse la table à Champs donne une impression de voyage au temps de la cour de la tsarine Catherine II.
Des couverts en argent et quelques pièces d’orfèvrerie provenant du château d’Azay-le Rideau, également géré par le Centre des monuments nationaux, et de collections particulières complètent le dressage de la table.
Le faste de la cour impériale
L’art de la porcelaine est l’un des phénomènes artistiques les plus marquants du XVIIIème siècle, art qui s’imprègne des idées esthétiques de l’époque. La porcelaine précieuse, élégante et à l’émail éclatant, satisfaisait le désir de luxe, les caprices de goût, de style et de mode de vie des monarques européens et était un élément indispensable au faste d’une cour royale
ou impériale. Sur la table impériale russe, la vaisselle en porcelaine apparaît au début des années 1720-1730, mais ce n’est seulement qu’au milieu du siècle qu’une attention particulière est accordée à celle-ci pour magnifier les repas officiels.
Deux circonstances importantes ont contribué à cela :
- La première est la volonté politique de la mise en œuvre d’une production russe de porcelaine au XVIIIème siècle.
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La deuxième tient au véritable culte de la fête et à la recherche de la perfection gastronomique inhérents au XVIIIème siècle, que certains ont qualifié de siècle galant.
La table des aristocrates russe tend à associer les innovations européennes avec les traditions nationales russes, tout en respectant les règles de l’art de la table, les modes de préparation et le service très codifié des plats. Le point culminant des fêtes est le repas officiel, distingué par l’incroyable pompe et par la délicatesse des plats.
La France, en tant qu’arbitre des élégances, a eu un impact important non seulement sur la mode vestimentaire, mais aussi sur le cérémonial et la vie quotidienne de la cour en Russie comme dans d’autres pays.
Toutefois, il est à noter que le service « à la française » a été abandonné à partir du XIXème siècle au profit du service « à la russe ». Pratiqué depuis le Moyen Âge en France, le service « à la française » consistait à présenter tous les plats en même temps sur la table, les convives se servant assis comme bon leur semblait. Le service « à la russe » a été introduit par le prince Alexandre Kourakine, ambassadeur de Russie en France en 1810.
Le service « à la russe » revêt la forme d’une succession de plats présentés aux convives assis. Les verres ne sont plus servis à la demande par les serviteurs et rapportés après usage mais sont placés sur la table devant l’assiette. Cette pratique s’est progressivement répandue dans toute l’Europe occidentale.
Exemples de menus à la cour de la Tsarine :
« Fricassée de langues de rossignols. Ragoût de lèvres et d’oreilles de cerfs. Yeux de bœufs
en sauce, pour le réveil du matin. Lèvres d’élans à la crème fraiche, cuisses d’ours bouillies,
tartes aux pigeons au four ».
Pour aller plus loin
La tsarine Catherine ll de Russie (1729-1796), veuve du tsar Pierre III, dirigea « toutes les Russies » d’une main de fer durant 34 ans. Pendant ce règne, le plus long de l’histoire du pays, elle réussit à développer le commerce et l’industrie, à établir un système d’éducation des jeunes gens, à développer les hôpitaux, à fonder des nouvelles villes, à constituer une importante bibliothèque impériale, à favoriser les arts et surtout à tenir tête à tous les envahisseurs voisins ou lointains. Toutes ces politiques lui valurent le surnom de Catherine la Grande.
La Manufacture impériale de porcelaine de Saint-Pétersbourg a été fondée par l’impératrice Elisabeth en 1744 grâce à la mise au point des méthodes de production de la première porcelaine russe. La Manufacture appartenait à la famille impériale et cette porcelaine très fine était fort prisée à la cour. Le prestige de la Manufacture impériale est né de la production de luxueux
En savoir plus:
Kouskovo dresse la table à Champs – Un service impérial d’exception
au château de Champs-sur-Marne
jusqu’ au 15 mars 2018
http://www.chateau-champs-sur-marne.fr