Le 61 rue de Monceau, l’autre hôtel Camondo

Partis de Constantinople et installés à Paris en 1869, le comte Abraham-Béhor de Camondo (1829-1889) et son frère Nissim (1830-1889) choisissent de s’établir avec leur famille en bordure du parc Monceau. La périphérie sud du parc fait alors l’objet d’une opération de lotissement par les frères Pereire afin d’y élever des hôtels particuliers de prestige.

Le Comte Abraham de Camondo recevant de l’architecte Destors les plans de son hôtel,
attribué à Eugène-Stanislas Oudinot (1827-1889), 1879
Vitrail, verre peint à la grisaille
Paris, musée d’Orsay, inv. OAP 263
Photo © Ministère de la Culture – Médiathèque de l’architecture et du patrimoine, Dist. RMN-Grand Palais / Jean Gourbeix

En juin 1870, ils acquièrent deux terrains mitoyens au 61 et 63 rue de Monceau. L’exposition dévoile une sélection de documents et d’acquisitions récentes qui renseignent de façon détaillée sur l’architecture, la décoration, l’ameublement et les collections d’œuvres d’art de cette demeure d’exception que le comte Abraham-Béhor fait construire en 1875 par l’architecte Denis-Louis Destors (1816-1882) au 61, rue de Monceau et dont l’intérieur est entièrement détruit dans les années soixante-dix.

Hôtel Camondo – Grand salon, vers 1875
Épreuve sur papier albuminé à partir d’un négatif verre, collée sur carton bleu
Sur le montage, inscr. ms encre noire, en bas à dr. : « 14 » ; tampon encre bleue, en bas à dr. : « D Destors Architecte Paris »
Paris, Musée Nissim de Camondo, inv. CAM 1147.8 © MAD, Pari

Outre des photographies de l’hôtel en 1875, des plans et élévations publiés par Le Moniteur en 1880, des inventaires et catalogues de ventes liés à la succession d’Abraham-Béhor de Camondo en 1893, puis à celle de son épouse Régina en 1905, c’est aussi l’occasion pour le public de découvrir des œuvres majeures et pour la plupart inédites.

Esquisse pour Le Triomphe de la civilisation, vers 1875
Paul-Joseph Blanc
Gouache, encre noire et plume sur papier brun, collé sur carton brun
Signé, au bas : « Joseph Blanc – Plafond pour Camondo »
Paris, Société historique et littéraire polonaise / Bibliothèque polonaise de Paris, inv. Rys. 438.1
© Académie Polonaise des Sciences et des Lettres (PAU), projet PAUart

Parmi les plus emblématiques, citons des panneaux de laque provenant du boudoir chinois, deux dessins aquarellés réalisés par Denis-Louis Destors pour le concours d’architecture de l’Académie des Beaux-Arts en 1876, un écran de cheminée et deux chaises ayant appartenu à la comtesse Régina ainsi qu’une livrée de domestique en panne de velours rouge.

Écran de cheminée
Bois sculpté et doré sur fond laqué noir ; broderie d’application en fils de soie multicolores sur fond satin noir.
Paris, maison Fourdinois (non estampillé), vers 1874 ?
Monogramme brodé : « RC » (sous une couronne comtale)

L’histoire de cette demeure est également évoquée. Au terme d’une succession difficile, l’hôtel du comte Abraham-Béhor de Camondo est vendu en 1893 à Gaston Menier (1855-1934), propriétaire de la célèbre chocolaterie de Noisiel. De la cave au grenier, tout est mis aux enchères.

Au cours de ces ventes, l’entrepreneur et son frère Albert achètent plusieurs tapisseries et quelques meubles. Au-dessus de la porte cochère, sur le médaillon central, les initiales du comte Abraham Béhor de Camondo sont effacées pour y graver celles de Gaston Menier. L’aménagement intérieur de l’hôtel Menier est connu par des photographies conservées au musée d’Orsay ainsi que par le catalogue de vente de sa succession en 1936. Ces documents ont permis de retracer le parcours de certaines tapisseries provenant de la collection Camondo.

Coupe longitudinale de l’hôtel du comte Abraham-Béhor de Camondo situé au 61, rue de Monceau
Denis-Louis Destors (1816-1882), 1876
Plume, encre noire et aquarelle gouachée, sur papier
Paris, MAD, Musée Nissim de Camondo, inv. CAM 2018.1.1, don Galerie Steinitz, 2018 © MAD, Paris / Jean Tholance

En 1946, Jacques Menier (1892-1953) met en vente l’hôtel qu’il a hérité de son père qui devient alors le siège des Aciéries de Pompey. Revendu en 1968, il est acheté par l’Union des Assurances de Paris (UAP). Vers 1977-1980, le décor intérieur est détruit – notamment le grand escalier – et la distribution très modifiée. La serre, pièce majeure de la demeure, est démolie et les communs restructurés.

En 1979, les façades et la toiture de l’édifice sont classées au titre des Monuments Historiques sauvant la bâtisse d’une destruction complète. L’espace intérieur est à nouveau remanié en 2001, avant l’installation en 2005 du locataire actuel, la banque Morgan Stanley.

Livrée de domestique : gilet et culotte à pont avec des boutons en métal doré aux armes du comte Abraham-Béhor de Camondo Fin XIXe -début XXe siècle
Paris, Musée Nissim de Camondo, inv. CAM 2016.1.1 et 2 © MAD, Paris / Jean Tholance

Réalisée grâce au soutien des donateurs du musée dont la générosité permet d’enrichir régulièrement le fonds des souvenirs de la famille Camondo, cette exposition apporte un éclairage nouveau sur l’œuvre de bâtisseur et collectionneur du comte Abraham-Béhor de Camondo.

Cette exposition a fait l’objet de nombreuses recherches consignées par les commissaires dans un document qui  est proposé en téléchargement sur le site  du musée des Arts Décoratifs

En savoir plus:

Musée Nissim de Camando

63, rue de Monceau
75008 Paris

Jusqu’au 15 mars 2020

https://madparis.fr/

 

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