Joseph-Théodore Deck est né en 1823 à Guebwiller, une commune du Haut-Rhin. Il rêvait de devenir sculpteur mais ses origines modestes l’orientèrent vers un métier plus prosaïque : celui de potier céramiste. Il apprend la technique de la céramique en tant que fabricant de fours couverts de carreaux en céramique et voyage en Allemagne, Hongrie et en Autriche afin de se perfectionner.
A l’âge de 24 ans, il s’installe à Paris afin d’exercer son art et travaille dans une usine qui fabrique des fours en céramique. Il ouvre son propre atelier de faïence en 1856 avec son frère et son neveu et se spécialise dans le style oriental et plus particulièrement dans le style d’Iznik. Dans les années 1880 il explore la tradition chinoise et collabore avec Raphaël Collin, un peintre académique professeur à l’académie des Beaux Arts reconnu pour les liens qu’il a tissés entre l’art français et l’art japonais à la fois en peinture et en céramique. Il a publié un traité sur l’art de la faïence en 1887.
Artiste, décorateur et chimiste artisan, il privilégie la surface picturale et la recherche chromatique. On lui doit une large gamme de techniques nouvelles comme la glaçure sur feuille d’or, appliquée sur les pièces décoratives. Théodore Deck réalise aussi d’importants travaux de céramique architecturale à l’exemple de l’ornementation murale embellissant l’hôtel de la comtesse de Païva, sur les Champs-Élysées.
Alliant une solide technique à une imagination stylistique débordante, va s’intéresser de très près aux couleurs. il crée une palette d’émaux inédits, inspirés à la fois de la Renaissance italienne, de la Grèce antique, du naturalisme japonais et de l’Orient islamique.
Théodore Deck, c’est d’abord un bleu qui porte son nom. Un bleu superbe, opaque et moins vitrifié, aux vibrations encore inconnues, dont la qualité principale est de modifier sa nuance en fonction de l’épaisseur. Cette couleur turquoise vaut au céramiste d’être récompensé en 1861 à l’Exposition universelle des arts industriels de Paris.
C’est un tesson provenant de Perse qui le met sur la piste de ce bleu évocateur. Il l’analyse et découvre que sa composition est complétement différente de ce que l’on produit alors en Europe. Il retrouvera la formule permettant d’obtenir cette couleur intense à la jonction entre le bleu turc, le bleu persan, le bleu égyptien et le bleu chinois, une teinte d’un turquoise profond.
Ce sont des peuplades venues d’Anatolie qui véhiculèrent cette technique ne contenant que 5 % de colorants. Le contrôle de la température de cuisson est essentiel pour l’obtention de la couleur. Plutôt que d’utiliser du cobalt, Théodore Deck use de l’oxyde de cuivre, qui, mélangé à l’oxygène, provoque une transmutation chimique. Les recherches sur le bleu de cuivre avaient été initiées par Louis Alphonse Salvétat (1820-1882) à la manufacture de Sèvres, Joseph-Théodore Deck les approfondissant pour en faire un succès aussi bien esthétique que commercial.
Auteur d’un traité magistral sur la faïence, il est nommé en 1887 directeur de la manufacture nationale de Sèvres et forme ainsi plusieurs céramistes talentueux de l’art nouveau : Edmond Lachenal, Adalbert de Beaumont, Ernest Carrière.