Des inventions maniéristes de la Renaissance à l’éclectisme du Second Empire, en passant par les arabesques du Grand Siècle et les grâces du style rocaille, chaque souverain a marqué de son empreinte le château de Fontainebleau. A dix ans d’intervalle, Marie-Antoinette y fait réaliser deux joyaux par les plus grands artistes de son temps : le boudoir turc (1777) et le boudoir d’argent (1786). Dans ces cabinets de retraite, la reine échappe à l’étiquette de la Cour et conjugue l’expression des nouveautés les plus extravagantes avec un Orient de fantaisie.
Ce boudoir est le seul témoignage subsistant intégralement avec son décor de turqueries royales, qui fascinaient tant la noblesse du XVIIIe siècle en France . D’ailleurs, deux autres boudoirs turcs existaient aussi à Versailles. Ils ont disparu. Les relations diplomatiques nouées entre la France et l’Empire Ottoman depuis Louis XV sont à l’origine de cette mode orientalisante dans les arts.
Aménagé sur des plans de l’architecte Richard Mique, le boudoir Turc est décoré par les frères Rousseau. La reine veut un Orient de fantasmes et de fantaisie. Tout d’abord, un décor de lambris sculptés et peints, semés d’ornements dorés : personnages coiffés de turbans, croissants de lune, sabres, étoiles. Sur les murs, des cassolettes sculptées où la reine fait brûler des parfums. Des miroirs mobiles, innovations de l’époque, permettent d’occulter la fenêtre et de créer une atmosphère de reflets, des jeux de lumière, comme dans un harem».
L’engouement pour les turqueries ne faiblit pas au début du XIXe siècle, lorsque l’impératrice Joséphine s’installe dans ce refuge féminin. Elle offre un nouvel éclat à cet univers des Mille et une Nuits pour lequel elle commande à Jacob-Desmalter un mobilier mêlant l’acajou et les bronzes dorés, garni d’un velours scintillant rappelant le fameux goût “à la turque” et orne la pièce de précieuses étoffes : mousselines brodées, taffetas ou encore festons lamés or à motifs vermiculés.